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La Petite République, 1 octobre 1902

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La Petite République
1 octobre 1902


Extrait du journal

La mort vient de frapper, d’un coup nisérableinent tragique, le grand écri'ain qui fut un grand combattant. Ceux qui veulent faire deux parts de ;a vie et admirer son œuvre littéraire •m réprouvant ou flétrissant son œuvre sociale se trompent. C’est parce qu’il a eu, comme écrivain, le sens de la vie large, débordante, remuante, qu’il a été révolté par les mesquines combinaisons nu mensonge et par ce que le crime des castes finissantes a de ratatiné et de sordide. Il a démêlé ce qu’il y avait de névrosé, d’étriqué et de faux en un du Paty de Clam, avec la même force d’instinct et de génie qui lui révélait le vasle mouvement des sociétés modernes. C’est le même sens de la vie qui le con duisait tous les jours plus avant dans le socialisme. Le prolétariat lui était apparu, dès Germinal, comme une grande force obscure et profonde qui allait monter peu à peu et s’épanouir dans la clarté. El il cherchait maintenant dans Tra vail, dans Vérité, comment cette force neuve et immense pourrait s’organiser sans se figer, et garder dans un ordre nouveau la mobilité et la fluidité de la vie. Le grand et robuste ouvrier est sur pris par la mort traîtresse avant d’avoir accompli toute son œuvre. Il ne verra pas l’achèvement de justice qu’il n’a vait point cessé d’espérer, et le drame de vérité où il fut un acteur si puis sant attend encore, comme il disait, « le dernier acte ». Ainsi la mélancolie des choses ina chevées s’ajoute, pour lui, aux poi gnantes épreuves qu’il eut à subir. Mais il savait que la vie, en son mouvement éternel, dépasse et complète incessam ment ce que toute destinée individuelle, si grande et glorieuse soit-elle, a de mi sérablement borné. Et nous affirmons avec lui, jusque dans cette terrible épreuve qui atteint en plein cœur les modestes combattants du droit, notre confiance en la victoire de la vie, qui est la victoire do la vérité. Tous les citoyens probes et libres, tous les hommes de pensée haute et droite, tous les prolétaires dont Zola perçut la puissance encore confuse et annonça l’avènement, ressentiront une émotion douloureuse eu apprenant la mort du puissant romancier qui fut un grand citoyen. JEAN JAURÈS....

À propos

La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.

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