Encart de publicité en faveur d’un concert des Batutas en France, Le Journal, 1922
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Dans le registre savant, on peut également citer les œuvres de Darius Milhaud, comme Le Bœuf sur le toit, musique pour ballet sur un argument de Jean Cocteau (1920), composé sur le mode d’un ready-made à partir de 24 fragments de maxixes, tangos, polkas et sambas brésiliens écrits par Chiquinha Gonzaga, Catulo da Paixão Cearense, Marcelo Tupinamba, Ernesto Nazareth, etc. Et O Boi no Telhado, grand succès du carnaval de 1917.
C’est d’ailleurs cette pièce qui a donné son nom au restaurant Le Bœuf sur le toit, devenu le grand lieu de rendez-vous des avant-gardes parisiennes des Années folles, où le jazz notamment a gagné ses lettres de noblesse. C’est aussi l’origine de l’expression « faire le bœuf », utilisée aujourd’hui encore par les musiciens de jazz comme synonyme de jam session.
Après la Seconde Guerre mondiale, la samba connaît un regain de mode en France. Mais elle est cette fois chantée en français ou en anglais par des artistes américains. Les versions françaises sont en général des créations à part entière, qui n’ont que très peu de rapport avec les originaux brésiliens. On joue sur les registres romantique, érotique ou comique : Henri Salvador, Georges Guétary, Dario Moreno ou Les Compagnons de la chanson imposent pour la première fois des « sambas » chantées en français au hit-parade. Dont Si tu vas à Rio…, qui est en réalité une marche de carnaval, avec des paroles relativement tristes en hommage à une actrice décédée.
Dans les années 1960, une nouvelle génération d’auteurs-compositeurs-interprètes dénonce cet exotisme facile et propose de nouvelles versions plus « authentiques » des musiques brésiliennes : c’est le cas de Pierre Barouh par exemple, de Claude Nougaro, Georges Moustaki, Françoise Hardy ou encore Marie Laforêt qui contribuent à faire connaître les nouveaux genres brésiliens aux publics français, la bossa nova mais aussi la chanson engagée, le tropicalisme, etc.
Les collaborations entre artistes français et brésiliens se font alors plus nombreuses, comme celles entre Claude Nougaro et le guitariste Baden Powell.
Comment « La Mattchiche » de Félix Mayol est-elle reçue en France à sa sortie ? Peut-on déjà parler de « réappropriation culturelle » ?
Créée dans le théâtre parisien de la Scala en 1905, la Mattchiche est l’un des plus grands succès de Félix Mayol. Avec plus de 240 000 partitions vendues, cinq versions enregistrées chez Gramophone, Odéon, A.P.G.A. et Parlophone, la Mattchiche est devenu un refrain populaire de la Belle Époque. Reprise par Fragson (1869-1913), Mistinguett (1873-1956) et le jeune Maurice Chevalier (1888-1972), elle traverse l’Atlantique, gagne les États-Unis et le Canada en 1905, et on la retrouve même au Brésil en 1906.