Première du film « Les dieux du stade » de Leni Riefenstahl
JO de Berlin, 1936. La réalisatrice Leni Riefenstahl reçoit l’autorisation de tourner un film sur l'événement : il est projeté en 1938. Ce film de propagande nazi peut être vu comme un documentaire sportif mais aussi comme un chef-d’œuvre artistique.
L’œuvre majeure de Leni Riefenstahl
« Princesse de la lumière bleue » pour le journaliste José Germain, Leni Riefenstahl, qui « vécut dans l’intimité de M. Hitler », charme tous les interlocuteurs qu’elle rencontre.
Georges Bateau, qui la croise lors d’un séjour à Paris, la décrit comme une « jeune femme, belle, élégante, au regard vif ». Passionnée par le sport, prônant un culte du corps proche des idées du parti nazi, Leni Riefenstahl, dédie son œuvre à « la jeunesse du monde entier et à la mémoire de Pierre de Coubertin ».
Pour réaliser son film, Leni Riefenstahl, assistée d’une équipe forte de près de 300 membres, multiplie les innovations. Le Petit Parisien mentionne les 400 000 mètres de pellicule enregistrée, les deux ans de montage, la caméra sous-marine, la caméra portée par un ballon, la caméra sur rails, etc. Afin de pouvoir filmer sous des angles de prise de vue particulier, certaines scènes sont filmées après les Jeux.
Dans l’entretien qu’elle accorde au journaliste de Paris-Soir, Leni Riefenstahl précise qu’elle consacre un temps important à ces « travaux de laboratoire » et qu’elle va se rendre aux États-Unis afin d’y étudier de nouveaux procédés de techniques.
Présenté le 20 avril 1938, le film reçoit les louanges de Goebbels et plusieurs récompenses cinématographiques. Il sort rapidement en trois versions, mais suite aux retouches effectuées par sa réalisatrice, plusieurs autres versions vont circuler. Le 24 juin 1938, le film est projeté pour la première fois à Bruxelles où Leni Riefenstahl déclare avoir pleuré de joie.
Un accueil enthousiaste et unanime
Le film est projeté pour la première fois en France le 30 juin 1938. Organisée par le Comité olympique français, la projection est réservée à la jeunesse sportive française, représentée par « plus de mille jeunes athlètes ».
Les journalistes ayant assisté à cette projection laissent paraître leur enthousiasme dans leurs articles. Sous le pseudonyme Fauteuil 22, le critique de cinéma du journal catholique La Croix présente cette œuvre comme un « beau film que la jeunesse verra avec plus de profit que les sempiternelles et émollientes histoires sentimentales » et y voit un manifeste pour la « défense du sport et du corps » dénonçant les dérives du professionnalisme.
Georges Champeaux écrit dans Le Petit Journal, organe du Parti social français, que ce film est « une des réalisations capitales de l’art cinématographique » au même titre que Blanche-Neige et les sept nains de Walt Disney.
Le Journal assure qu’il est impossible de « résister au dynamisme formidable qui jaillit du film […], l’incontestable chef-d’œuvre du cinéma contemporain […], hymne éternel à la Force et à la Beauté humaine ». José Germain voit ce film comme le moyen d’ « éduquer l’univers à la grecque ».
Leni Riefenstahl (1902-2003)
Danseuse, artiste, actrice, réalisatrice et photographe allemande, Leni Riefensthal réalise la plupart des films de propagande nazis. Après La Victoire de la foi (1933) sur le congrès de Nuremberg, elle réalise le Triomphe de la volonté (1934) puis les Dieux du Stade (1936). Après la guerre, elle est internée dans un camp de transit par les Américains avant d’être classée parmi les « suivistes ». En 1954, son dernier film de fiction Tiefland (réalisé durant la Seconde Guerre mondiale) est diffusé. Leni Riefensthal a réussi à imposer sa conception de l’art.