Les réfugiés du génocide arménien de 1915
Lorsque le 1er novembre 1914, l’Empire ottoman rejoint dans la guerre les puissances de la Triple-Alliance, les Chrétiens arméniens sont considérés comme des ennemis. Des unités spéciales de l'armée turque procèdent, de janvier à mai 1915, à une élimination organisée des chrétiens des villages situés au nord de la Perse tandis que les persécutés tentent de fuir.
Septembre 1915 : Les militaires français sauvent 5 000 Arméniens
Des milliers de personnes fuient alors la Turquie, par voies terrestres ou maritimes, afin de trouver refuge dans un pays voisin ou vers les États de la Triple-Entente.
La marine militaire française vient à leur secours. Réfugiés au nord de la baie d’Antioche, des milliers d’Arméniens affamés et avec peu de munitions ne réussissent plus à contenir les assauts répétitifs des soldats turcs. Des navires militaires français viennent les secourir et 5000 personnes, dont 3000 femmes, enfants et vieillards, sont embarqués et emmenés à Port-Saïd (Egypte).
Le quotidien L’Ouest-Éclair, relate dans son n° 5911, du 22 septembre 1915, les évènements.
En 1928, un ouvrage intitulé : L’Histoire de la Grande guerre : la Guerre en Images vécue et racontée au jour le jour : récits de combats... évoque ce sauvetage des Arméniens par la marine française.
Il ne sagissait nullement d'un acte isolé. De nombreux pays furent confrontés à cet afflux de réfugiés.
Un massacre de grande ampleur
Depuis le début de l’année 1915, les chrétiens arméniens sont persécutés et des milliers d’entre eux ont quitté la Turquie. Français, Anglais et Russes font face à cet exode massif. L’Écho de Paris (15 janvier 1915) avance le chiffre de 80 000 personnes ayant déjà « franchi la frontière russe ».
En avril, les autorités turques intensifient les arrestations et les exécutions. Plusieurs quotidiens relatent alors ces faits : « Quatre cents Arméniens, le vicaire du patriarchat arménien et le député arménien d’Erzeroum ont été arrêtés » à Constantinople (Le Journal, 29 avril 1915) ; en mai « six cents Arméniens arrêtés à Constantinople ont été envoyés à Angora » (L’Intransigeant, 18 mai 1915)
Le 18 mai, L’Intransigeant titre :« Massacre d’Arméniens. Selon ce journal, Turcs et Kurdes ont enlevé 300 femmes et massacré 2 000 Arméniens lors de l’invasion de la Transcaucasie ».
Le Petit Journal (25 mai 1915) publie : « Le gouvernement ottoman responsable des massacres commis en Arménie ».
Le 25 mai, L’Humanité, publie la déclaration commune de la France, de la Grande-Bretagne et de la Russie qui s’insurgent contre les massacres et dénoncent la complicité des autorités turques.
Des vagues successives de réfugiés
Ces évènements de plus en plus violents précipitent l’exode des Arméniens. Le flot des arrivées ne semble pas tarrir.
Le Petit Parisien (13 août 1915) précise que 60 000 arméniens sont arrivés à Yazdyn, en Perse, et que les autorités en attendent plus de 100 000 à Van.
Des croiseurs français récupèrent régulièrement des réfugiés sur les côtes syriennes. En octobre 1915, des Arméniens sont amenés près de Port-Saïd. La Croix-Rouge et le gouvernement égyptien les aident avec les moyens dont ils disposent : « La misère est grande parmi les malheureux qui ont abandonné leurs foyers dans un dénuement complet, après avoir vécu près de trois mois dans les montagnes qui bordent la côte, en lutte perpétuelle avec les Turcs » (L’Ouest-Éclair du 04 octobre 1915).
Les Américains sont choqués et « recueillent des fonds pour recevoir les émigrés qui désireraient partir » (L’Ouest-Éclair du 26 septembre 1915).
En 1915, la presse française avait ainsi informé ses lecteurs, en temps réel, sur le premier génocide perpétré au XXe siècle.