Lénine, la France et l'Angleterre
En 1922, la fin de la guerre gréco-turque redéfinit le jeu des alliances entre la Russie et les puissances occidentales.
Fin 1922, alors que la guerre gréco-turque vient de se terminer par une victoire éclatante de la Turquie, "la question orientale" est la pierre angulaire des relations entre la Russie, la France et l’Angleterre.
Les armées turques étaient en effet soutenues depuis le départ par la Russie contre les puissances de "l'Entente", jusqu'à ce que la France puis l’Angleterre se rallient à la position russe.
Dans une interview de Lénine par l'hebdomadaire britannique The Observer reprise par L'Humanité en novembre 1922, le journaliste interroge : "La fin de la guerre gréco-turque, soutenue par l'Angleterre, n'est-elle pas la meilleure occasion de conclure un accord ?” Réponse de Lénine :
"Nous avons toujours désiré cet accord et nous le désirons actuellement plus que jamais. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que la fin de cette guerre mette également fin à nos désaccords avec l'Angleterre. Et nous espérons que l'intérêt du gouvernement anglais prendra le dessus sur les suggestions de la presse antirusse."
Les relations avec la France sont également au cœur des préoccupations, comme le souligne Lénine :
"Tout rapprochement avec la France nous est très désirable du fait que les intérêts commerciaux de la Russie exigent impérieusement l'établissement de relations normales avec cette puissance continentale."
Le conflit gréco-russe achevé, il reste néanmoins de nombreuses questions géopolitiques en suspens pour lesquelles la Russie revendique une participation active. Et l'homme fort de la Russie n'hésite pas à user de menaces à peine voilées :
"Le gouvernement russe estime que si la Russie est invitée uniquement au règlement de la question des Détroits, il s'ensuivra infailliblement une série de perturbations économiques dont la France et l'Angleterre auront le plus à souffrir."
Quant à la question de la légitimité de la SDN, Lénine est on ne peut plus clair :
"La Société des Nations est à tel point privée de quoi que ce soit qui puisse rappeler l'établissement d'une égalité réelle entre les nations, que notre attitude négative envers cette Société n'exige aucun commentaire."