1917 : Les bataillons de femmes en Russie
En 1917, des bataillons de femmes russes sont envoyés au front dans le but de donner l'exemple aux soldats démoralisés.
Au printemps 1917, des unités de combat sont créées avec des femmes volontaires pour mener la bataille. Ces unités entièrement féminines sont formées après la Révolution de Février, dans un ultime effort du gouvernement provisoire russe pour pousser la masse des soldats exténués par la guerre à continuer à combattre. Leur courage exemplaire doit remotiver les soldats démoralisés.
"Celles qui donnent l'exemple aux hommes", écrit Le Petit Journal dans son supplément illustré, représentant ces femmes combattantes à l'uniforme militaire et à la coupe de cheveux masculine.
Sur quinze unités créées en 1917, seuls le 1er Bataillon de la mort des femmes russes et le Bataillon de Perm sont déployés au front.
C'est Maria Botchkareva, une paysanne qui a servi dans l'armée russe dès novembre 1914 et a atteint un grade de sous-officier, qui crée le Bataillon de la mort comme le raconte Le Petit Journal :
"Mme Botchkareva avait pris du service depuis le début de la guerre. Elle en supporta vaillamment toutes les fatigues, prit part à maints combats, fut grièvement blessée. Une fois guérie, elle retourna sur le front, se vit décerner décorations, citations, médailles et croix militaires. Vint la Révolution. Mme Botchkareva, indignée de voir trop de soldats palabrer au lieu de se battre s'avisa de faire donner au sexe fort une leçon de patriotisme par le sexe faible. Elle créa le « Bataillon de la Mort ». En quinze jours, elle recruta 250 femmes prêtes à la suivre. Et ces femmes la suivirent vaillamment. Dans les combats entre Smorgone et Krevo, le bataillon des femmes s'est admirablement conduit. Il a fait une centaine de prisonniers. Mme Botchkareva et dix de ses soldâtes ont été blessées, notamment Mme Skrydloff qui porte le grade de lieutenant. Le bataillon compte vingt tuées et huit prisonnières. Cinquante seulement, sur les deux cents femmes que comporte le bataillon sont sorties indemnes des combats. Voilà un exemple qui, il faut l'espérer, ne sera pas perdu pour les soldats russes du sexe fort que la politique pourrait encore retenir loin du front."
Ces bataillons de femmes ont fasciné autant que choqué, comme l'exprime le journal littéraire Le Temps en septembre 1917 :
"Nous demeurons alors déroutés, stupéfaits, et malgré l’admiration qu’il nous arrache, disons le mot, presque choqués. Ainsi personne n’a nié le courage inouï du bataillon des femmes russes qui, sur l’âpre versant des Carpathes, vient de se mêler à l’effroyable tuerie et a arrosé de son sang la terre de Galicie, mais n’est-ce pas plutôt un cri de stupeur épouvantée que nous a arraché un tel spectacle ? Trop d'images, en lui, ne révoltaient-elles pas nos instincts, notre esthétique, toutes nos façons de penser et de sentir ?"
Après la Révolution d'Octobre, le nouveau gouvernement bolchevique ordonnera la dissolution des bataillons de femmes, en novembre 1917.