1871 : cession de l'Alsace-Moselle
À la stupeur de la défaite de la guerre de 1870 s'ajoute l'humiliation de l'annexion de l'Alsace-Lorraine (alors « Alsace-Moselle ») par le nouvel Empire allemand. Vite, le mythe de la revanche attise le nationalisme en France, et sème les germes de la « haine de l'Allemand ».
Les répercussions de la défaite française contre la Prusse
La guerre entreprise par Napoléon III contre la Confédération allemande du Nord le 19 juillet 1870 s’achève sur une double défaite : celle de l’Empire vaincu à Sedan, puis celle du Gouvernement de la Défense nationale qui poursuivit la guerre après l’avènement de la IIIe République (4 septembre 1870). Les armées allemandes assiègent Paris à partir du 20 septembre 1870. La débâcle est consommée : le gouvernement français décide de capituler et de signer un armistice le 28 janvier 1871.
Cette victoire a un rôle décisif dans le processus d’unification territoriale et nationale allemande. Le roi de Prusse Guillaume Ier et son chancelier Bismarck arrivent à Versailles pour négocier avec le gouvernement français le futur traité de paix. Le 18 janvier 1871, dans la galerie des Glaces, l’Empire allemand est proclamé.
Bismarck impose à la France de se doter d’un gouvernement légitime pour signer le traité de paix. Thiers, nommé chef du pouvoir exécutif par la nouvelle Assemblée nationale, à dominante monarchiste et pacifiste, négocie les préliminaires de paix qui sont signés le 26 février 1871. L’exaspération est totale à Paris : une insurrection populaire éclate et donne naissance à la Commune.
Le traité de paix de Francfort est signé le 10 mai 1871, par Adolphe Thiers et Jules Favre (ministre des Affaires étrangères). Il est ratifié le 18 mai par l’Assemblée nationale après une intervention de Thiers qui le qualifie de « traité nécessaire ».
Les clauses du traité de paix et les conséquences de la perte de l’Alsace-Moselle
L’Empire allemand impose des clauses territoriales, économiques et humaines à la France. La France doit céder l’Alsace et la Moselle (icono 2), pour des raisons pangermanistes et économiques. Cette revendication suscite une vive émotion à l’Assemblée nationale qui s’exprime le 17 février 1871 par la « protestation de Bordeaux » des députés alsaciens et mosellans.
La France perd 1 694 communes et 20 % de son potentiel industriel, notamment textile, en Alsace. Thiers parvient toutefois à conserver Belfort. En échange, les Allemands obtiennent des compensations en Lorraine et le droit de défiler dans Paris le 1er mars 1871.
Bismarck impose également de lourdes indemnités de guerre à la France : 5 milliards de francs (6 dans les préliminaires) avec comme obligation de les rembourser avant mars 1874. Thiers lève successivement deux emprunts. Il parvient à en assurer le paiement définitif le 16 septembre 1873 : les troupes allemandes qui occupaient 21 départements quittent alors la France.
Enfin le traité stipule que les populations alsaciennes et mosellanes ont jusqu’à octobre 1872 pour choisir s’ils optent pour la France ou restent dans l’Empire allemand. On mesure à environ 30 000 le nombre d’optants sur environ 1,5 millions d’individus vivant dans ces deux régions.
La défaite et la cession de l’Alsace-Moselle constituent un enjeu mémoriel majeur en France entre 1871 et 1914. L’idée de Revanche s’exprime d’ailleurs plus encore dans la presse lors de la signature du traité de Versailles dans la galerie des Glaces en 1919, qui vise à effacer les humiliations du traité de Francfort, qu’au moment de la mobilisation de guerre en 1914.
Le thème des provinces perdues reste une illusion mobilisatrice et mystificatrice qui entretient le nationalisme et la haine de l’Allemand dans l’opinion publique. La presse y joue un grand rôle. Mais les gouvernements conservent la ligne politique de Gambetta : « Y penser toujours, n’en parler jamais ».