Écho de presse

Félix Nadar, caricaturiste génial des célébrités de son temps

le 20/12/2018 par Marina Bellot
le 06/10/2018 par Marina Bellot - modifié le 20/12/2018
Photographie du Panthéon Nadar par Nadar, 1854 - source : Gallica-BnF

Connu pour ses photographies des plus grandes personnalités de son époque, Nadar était également un dessinateur de génie, caricaturiste sans concession qui marqua la presse de son temps.

Son ami Baudelaire écrivit de lui : « Nadar, c'est la plus étonnante expression de vitalité. »

C’est peu dire en effet que le facétieux Félix Nadar a marqué son époque non seulement par ses célèbres photographies, mais aussi par son remarquable coup de crayon. 

Gaspard-Félix Tournachon, dit Nadar, est né en 1820 à Paris dans une famille d’imprimeurs. Peu intéressé par les études, il mène une vie de bohème au quartier latin et profite de l’explosion de petits titres de presse après la Révolution de 1830 pour exercer sa plume, entre compte-rendus de pièces de théâtre et feuilletons littéraires, genre alors en plein essor, et dans lesquels il se plaît à tourner en dérision les mœurs de la société bourgeoise. C’est à cette époque qu’il rencontre ceux qui deviendront de fidèles amis : Alexandre Dumas, Théophile Gautier, Charles Baudelaire ou Gérard de Nerval.

Si Nadar a une plume talentueuse, il a également un coup de crayon génial qui fera bientôt sa renommée. De son trait agile, il caricature ses contemporains avec gourmandise et acquiert tôt une grande notoriété.

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Caricature de Honoré de Balzac par Nadar, circa 1850 - source : Gallica-BnF
Caricature de Honoré de Balzac par Nadar, circa 1850 - source : Gallica-BnF

Le jeune Nadar rêve de gloire et ne s’en cache pas. En 1851, tout juste trentenaire, il ambitionne de constituer ce qu'il nomme un « Panthéon Nadar » en réunissant pour ce faire plus d'un millier de ses caricatures des gloires de l'époque, sur quatre planches lithographiques.

Écrivains et journalistes, personnalités du monde du théâtre, peintres et sculpteurs, musiciens : chacune des quatre planches doit être complétée par un ouvrage regroupant la biographie de ces célébrités. C'est un travail titanesque auquel s'attèle alors le jeune Nadar.

Caricature de Jacques Offenbach par Nadar - source : Gallica-BnF
Caricature de Jacques Offenbach par Nadar - source : Gallica-BnF
Caricature de Théophile Gautier par Nadar - source : Gallica-BnF
Caricature de Théophile Gautier par Nadar - source : Gallica-BnF
Caricature de Théodore de Banville par Nadar - source : Gallica-BnF
Caricature de Théodore de Banville par Nadar - source : Gallica-BnF

La réalisation du Panthéon s'avère cependant très onéreuse, et les ventes de la première planche décevantes : Nadar n'en écoule que cent trente-quatre exemplaires. 

Photographie du Panthéon Nadar par Nadar, 1854 - source : Gallica-BnF

Trop ambitieux et trop coûteux, le Panthéon Nadar n'en suscite pas moins curiosité et admiration. 

 « – Il ne paraîtra pas ! Les paris étaient ouverts. Il a paru ! » s'enthousiasme Le Journal pour rire, dont Nadar fut l'un des collaborateurs :

« Il n'y paraît que trop, au dire des sergents de ville préposés à la sûreté publique et qui ont fort à faire pour disperser les attroupements de curieux que l'ébahissement rend sourds au roulement menaçant des voitures les plus bruyantes.

Tout Parisien n'a pas douze francs dans sa poche pour se procurer le plaisir de contempler à domicile cette planche gigantesque et phénoménale sur laquelle figurent deux cent cinquante personnages, tous moins beaux mais plus curieux que nature. 

Le vulgaire désargenté fait donc queue à l'étalage des marchands de gravures pour se procurer gratuitement cet agréable spectacle. On s'y presse, on s'y pousse, on s'y heurte, on s'y bouscule que c'en est une bénédiction.

Deux cent cinquante grands hommes de lettres, y compris un demi-quarteron de femmes ! »

Pour Le Figaro, l'œuvre est si réussie que le propriétaire du quotidien, Hippolyte de Villemessant, rachète les droits de la première planche en 1858 pour la donner en cadeau aux nouveaux abonnés du journal. Un second tirage dans lequel Nadar intègre les principaux portraits de ceux qui auraient dû figurer dans les planches non exécutées, tels Rossini, Berlioz ou Delacroix.

« C'est une série de portraits ressemblants à faire peur ; c'est un chapelet de drôleries amusantes à vous retenir une journée tout entière à les regarder ; vous êtes au spectacle, et vous voyez défiler complaisamment devant votre binocle tout ce qu'il y a de figures remarquables ou curieuses dans la littérature et l'art modernes.

Bref, en un mot comme en cent, c'est quelque chose de superbe comme œuvre d'art, d'infiniment précieux comme renseignement et d'impayable comme vaudeville au crayon, où chaque touche a l'esprit d'une fin de couplet réussie. »

Malgré ce succès d'estime, l’échec commercial relatif de son Panthéon conduira Nadar à développer son activité de photographe.

Dans son atelier de la rue Saint-Lazare, ouvert en 1854, il passera alors six années à constituer un « Panthéon des artistes et des écrivains contemporains » – via le médium photo ce coup-ci, dans lequel il n'oubliera pas de s'inclure – et qui deviendra une source de documentation visuelle inestimable à propos des célébrités du Second empire.

Autoportrait de Nadar, date inconnue - source : Gallica-BnF
Autoportrait de Nadar, date inconnue - source : Gallica-BnF

Pour en savoir plus : 

Pierre-Jean Dufief, Correspondance Goncourt-Nadar, in: Cahiers Edmont et Jules de Goncourt, 2001, via persee.fr

Les photographies de l'atelier Nadar, à retrouver sur Gallica

Découvrir l'exposition de la BnF « Les Nadar, une légende photographique » (site François-Mitterrand) et l'exposition virtuelle.

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