Extrait du journal

cule nettoiera ces écuries ? Nous ne sa vons. Ce qui est certain, c’est qu’il y faudra les grandes eaux. C’est pour quoi il est intéressant de considérer le flot qui monte. Vous souvenez-vous de la grande pa nique dü 1er mai de l’année dernière, alors que chacun faisait d?5 provisions de sardines, et arrangeait sa cave poilf abriter sa terreur ? Ce fut un beau spec tacle que vraisemblablement nous re verrons, Devant cette fuite étonnante, Plus d’ün lièvre se prendra pour un fou dre de guerre, et nous approchons de plus en plus du moment où, pour ren verser l’édifice social, il n’y aura plus besoin- de héros, ni de barricades.Une simple promenade suffira. Les murs de Jéricho tombèrent,nous raconte la légende, lorsque les Hébreux en eurent fait plusieurs fois le tour au son de la trompette. Ce fait d’armes n’a vait pas eu depuis d’analogue. Pour s’emparer des forteresses et renverser des remparts, il avait fallu, depuis lors, se donner un peu plus de mal. Le pro dige paraît devoir se renouveler pro chainement, et le vieux bâtiment lézar dé va tomber en poussière,sans qu’on puisse savoir comment cela est arrivé. Quand la trompette sonnera, la vie s’arrêtera.Je voudrais bien savoir quels sont les canons qui se chargeront de nous fournir du pain, lorsque ceux qui font du pain n'en voudront plus faire. Ces canons, d'ailleurs, il n’y aura plus personne pour les traîner, la grève avant gagné jusqu’aux défenseurs de la société, et tout s'écroulera naturelle ment. Et, de même que pour faire déborder un vase plein, il suffit d'une petite feuil le de rien, ce sera cette loi de quatre sous, à laquelle, primitivement, nul n'a joutait la moindre importance, ce sera cette loi sur le repos hebdomadaire qui aura déterminé la culbute. Cette crise était peut-être nécessaire. C'est pourquoi je la vois venir avec une certaine sympathie. Elle est d'autant plus inévitable, qu’à la rigueur la Con fédération pourrait s’abstenir et laisser le Parlement achever tout seul le travail de démolition. Lui n'a même pas besoin de tambour ni de trompettes. Il se dé grade lui-même, ainsi que tout ce qu'il représente avec une ignorance de ce qu'il fait, qui serait de nature à nous tirer des larmes, si elle ne commençait par nous faire éclater de rire. Les gens de Jéricho laissaient passer les trompettes. On ne non; Conte point qu ils démolissaient eux-mêmes leurs créneaux pour faciliter la besogne des assiégeants en leur jetant ces matériaux au nez. C’est ce que font nos assiégés aujourd'hui ; et c’est en mettant euxmêmes leurs murs à bas qu'ils s’imagi nent défendre la citadelle. Je crois, d’ailleurs, que je les flatte, en leur supposant une intention quel conque. D’intention, ils n’en ont aucune. Sont-ils du troisième ou du quatrième état ? Ils n’en savent rien. Veulent-ils conserver ou sacrifier la propriété ? Ils l'ignorent. Sont-ils pour ce qui est, pour ce qui fut ou pour ce qui sera ? C'est selon l’aventure. En outre, fort étonnés qu’on leur demande autre chose que de manger des curés. Manger des curés, est-ce que cela ne suffit pas au bonheur de tout le monde en général, et à leur bonheur propre en particulier? Ils avaient fait un beau rêve. Ils s’é taient imaginé que, contents d'avoir dé moli le bon Dieu,les pauvres diables se garderaient d'aller plus loin et respec teraient les hases sacrées sur lesquelles ils ont édifié leur fortune et leurs jouis sances. Ils ne s’aperçoivent pas encore qu’en s’écroulant, les colonnes du tem ple vont le renverser sur eux....