Extrait du journal

pliées de ce sentiment d’abnégation ; il a jeté à l'eau deux ou trois de ses collègues dans une bourrasque, c’était sur leur prière instante ; s’il est resté, lui, au timon de l’Etat, ah ! tout le monde a pu deviner ce qu’il lui en a coûté en continuant à por ter le fardeau de la défense de l’Etat ! Aussi, lorsqu’il s’est agi de la présidence de République, son plus pressant désir eût été de se démettre de ses fonctions de chef du pouvoir exécutif, afin de ne pas sembler peser sur l’élection : et, s’il a dû faire quelques efforts pour assurer le succès de sa candidature, c’est qu’en son âme et conscience il était persuadé que nul, mieux que lui, ne pouvait assurer le salut de la République. Maintenant, les républicains de la veille s’abstiennent de toute brigue, de toute intrigue, de toute alliance avec les partis anarchiques; heureux de voir le parti modéré gagner la confiance de la France, charmés de le voir la réconcilier peu à peu avec la République, ils rendent grâce au ciel de n’ètre plus sur ce banc de douleur, nommé banc des ministres, et ils remercient la divine Providence de ce qu’il s’est rencontré neuf citoyens habiles et courageux qui ont bien voulu se dévouer à cette mis sion dangereuse d’exercer le pouvoir à leur place. En connaissant ainsi les sentimens qui unissent les glorieux fondateurs des institutions qui nous régissent, on comprend ce qu’il y a d’étonnement dans leur cœur, en voyant les ministres actuels qu’ils admiraient garder leurs portefeuilles devant un vote hostile de l’Assemblée. Ce n’est pas ainsi que nous agis sions , nous, et que nous agirions encore : Voilà leur pensée, et elle s’est traduite ce matin par une ironie un peu mordante dans le premier-Paris du National. Sous l’inspiration trop vive, sans doute, du désintéressement et de l’abnégation qui animent cette école politique dont il est l’organe, et pénétré, comme il l’est, de la sincérité des adversaires du cabinet et de l’accord qui ex iste entre l’Assemblée et le pays, il sort de ses habitudes de modestie, en faisant appel au souvenir qu’on a gardé de la con duite de ses amis ; il raille M. Barrot et ses collègues : « Abandonner des portefeuilles devant une majorité contraire, fi donc ! C’est ainsi, peut-être, que se conduiraient îles républi cains de la veille. » Ah ! ce n’est pas généreux : accabler les membres du cabi net , en leur rappelant les modèles qu’ils ont eus sous les yeux? Pardonnons ce mouvement d’amour-propre au National en fa veur de la fidélité aux principes constitutionnels , qui est assu rément le seul motif de sa sévérité. (Le Pays)....