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Journal de la ville de Saint-Quentin et de l’arrondissement, 15 février 1849

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Journal de la ville de Saint-Quentin et de l’arrondissement
15 février 1849


Extrait du journal

DOIT-ON CÉLÉBRER LES JOURNÉES DE FÉVRIER? — NON. Pourquoi après tout la France fêterait-elle l’anniversaire des journées de février ? — A-t-elle donné à qui que ce soit le droit de l’inculper comme complice dans ce coup de main con tre l’ordre et la légalité ? — N’a-t-elle pas travaillé avec éner gie et constance depuis dix mois pour arracher du pouvoir les instigateurs de l’émeute ? Et si l’intrigue a pu obtenir de la trop faible assemblée na tionale , un acte d’amnistie en faveur du gouvernement provi soire, qui dira que le bénéfice de ce vote s’étende jusqu’aux pro fesseurs de barricades ? Qu’on le sache bien, l’insurrection de février n’a pas un ca ractère différent des journées sanglantes qui, pendant 18 ans, ont agité le pays ; elle n’a pas plus de légitimité que l’attentat criminel du 15 mai, que l’insurrection vaincue de juin. — Elle a réussi. Soit? Le crime impuni est-il moins odieux que le crime qui n’échappe pas à la vindicte des lois ? Alors même que la fusillade de l’Hôtel des Capucines apparaî trait, comme au premier moment, un acte d’inexplicable ven geance : alors même qu’il expliquerait de terribles représailles. qui avait donné à quelques hommes incapables pour la plupart d’occuper honnêtement leur place dans la société, le droit de se porter l’organe de la volonté nationale, le droit de la violenter? Mais les révélations sont arrivées. On sait qu’une infâme co médie , dont tous les rôles étaient appris d’avance, a été jouée devant la porte de l’Hôtel du ministère des affaires étrangères ; pour avoir des cadavres on n’a pas reculé devant d’épouvantables assassinats ; le char funèbre attendait, les torches funèbres étaient prêtes et la sanglante mise en scène qui devait raviver une insurrection sans motifs s’est promenée dans les rues de la capitale. Une chose nous manque : le nom des auteurs, pour les flétrir. Si le peuple trompé s’est montré grand et noble dans sa vic toire , malgré les exemples de ceux qui ne reculaient pas devant l’assassinat, quel avantage peut en retirer l’insurrection de février ? Elle n’a pas pour elle l’excuse d’un entraînement passionné, elle fut couronnée par une atroce et froide comédie. La France a éprouvé un jour un mouvement indicible d’indi gnation , quand elle connut l’infâme liste des récompenses na tionales; le pouvoir, parfaitement innocent de cet outrage à la moralité publique, perdit cependant toute sa force devant cette glorification qu’il ignorait des assassins et des faussaires plus ou moins politiques qui avaient encombré les prisons de l’ancien régime. Un pouvoir, qui proposerait à la nation de fêter l’anni versaire des journées de février soulèverait la même indignation; il devrait, pour être logique, ouvrir à l’instant toutes les por tes (les prisons politiques. Juin est plus excusable que février ; l’horrible assassinat du général Bréa, plus compréhensible que le drame de l’hôtel des Capucines. 11 y avait eu, pendant trois mois, tant de promesses mensongères, tant d’excitations insen sées , que l’on s’explique les causes de cette dernière et terrible insurrection. Qui expliquera l’insurrection de février ? Jetons un voile, si l’on veut, sur ces tristes journées ; arrivons au résultat : en bas, la classe pauvre offre trois mois de misère au gouvernement qui s’était installé de lui-même à l’hôtel-deville ; en haut, commence cette indigne curée de places qui n’a rien ménagé ; viennent les commissaires parmi lesquels le bagne a réclamé plus tard ses pensionnaires ; viennent les amnistiés de l’ancien régime qui mettent au pillage les traitemens grands et petits des administrations sous le plaisant prétexte de républicaniser le pays....

À propos

Fondé en 1819, Le Journal de la ville de Saint Quentin publie les annonces judiciaires de son département sans le concours du gouvernement. L’initiative porte ses fruits puisque la publication du journal demeure assurée jusqu’en 1914.

 
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