Extrait du journal

Voici enfin le Paris bleuâtre de l'été, comme dilaté par la chaleur du beau temps. C'est le moment où les jardins pu blics ont toute leur évidence. Ils sont si gonflés de verdure qu'ils semblent écarter les maisons. De tous, le jardin du Luxem bourg a certainement le plus d'âme. Que de discours il a entendus, sur les lettres et les arts, la philosophie et la politique, aussi vains, sans doute, mais moins mo destes que le babil du jet d'eau, qui fait éternellement retomber dans l'eau ridée du bassin sa petite averse ! Cependant, ces propos ambitieux des étudiants ont une sorte de générosité qui est telle qu'on les entend volontiers. Ce qui fait qu'on aime les jeunes gens, c'est qu'on ne voit pas encore en eux les hommes médiocres qu'ils seront bientôt. C'est un beau dégui sement que la jeunesse. I Les autres jardins ont des visiteurs plus | simples. Celui du Champ de Mars plaît par sa nouveauté et par sa fraîcheur. 11 est planté de fleurs et d'enfants. Mais, au crépuscule, ces enfants sont remplacés par des amoureux, qui ne semblent être, eux aussi, parmi les arbres et les plantes fleu ries, que des signes de la saison. Hier soir, je traversais, vers huit heures, ces étroits, jardins qui sont au bas des...