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Journal des débats politiques et littéraires, 10 février 1906

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Journal des débats politiques et littéraires
10 février 1906


Extrait du journal

journal. C'est là, en effet, la cliarte de la presse française. Le gouvernement est responsable de ce qu'il fait, et nous le sommes tous de ce que nous écrivons. Il ne pourrait en être autrement sans que la liberté du gouvernement d'une part et la dignité de la presse de l'autre n'en reçussent une sérieuse atteinte. Tout le monde sait cela en France et au dehors, et on ne voit pas très bien pourquoi M. Jaurès a éprouvé le besoin de le faire dire par M. le président du Conseil. C'est là, chez lui, un phénomène psycho logique assez singulier. 11 est évidemment agacé de voir que la plupart des journaux, ou plutôt presque tous, soutiennent la politique du gouvernement dans la question marocaine, au lieu de s'être ralliés à la sienne. Cette union des esprits et des cœurs l'irrite. Il ne peut pas la croire tout à fait spontanée et, en tout cas, il la juge compromettante, pour qui? pour le gouvernement lui-même. Aussi prend-il soin de déclarer que « la politique du gouvernement est dé finie uniquement par les déclarations du gouverne ment devant les Chambres, par les votes des Assem blées, et que.ceux qui essayeraient de créer en sens contraire une équivoque serviraient mal les inté rêts du pays». Ehl sans doute; mais qui donc essaye de créer cotte équivoque ? Les déclara rations du gouvernement ont déterminé une po litique; la Chambro Ta approuvée dans un élan réfléchi de patriotisme, auquel n'ont manqué qu'une cinquantaine de socialistes. La presse, à son tour, Ta adoptée et défendue : elle a eu conscience de remplir un devoir en donnant au gouvernement toute la force d'opinion qui pouvait être en elle. M. Jaurès ne le lui pardonne pas ! Il exprime la crainte qu'en soutenant le gouvernement la presse n'ait l'air d'être inspirée par lui. Comment faire pour calmer ces alarmes? C'est difficile. Faut-il attaquer la politique du gouvernement? Alors, peut-être M. Jaurès serait-il satisfait. Il ne trouverait pas mau vais que la presse eût l'air d'être inspirée par lui. Mais l'action politique do la France ne serait-elle pas affaiblie lo jour oû l'unanimité morale qui s'est formée autour du gouvernement viendrait elle-même à s'affaiblir? Nous voudrions rassurer M. Jaurè3 : il a certaine ment été victime d'une illusion d'optique. La presse, bien qu'elle cherche à aider le gouvernement dans une passe difficile, n'en est pas moins indépendante. Chaque journal, chaque journaliste répond de ses articles, et, Dieu merci I M. Jaurès est seul respon sable des siens....

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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