Extrait du journal
Le général Franco vient de décider la création d'une npuvelle > école pour la formation des futurs diplomates. Le statut de cette ■ école est précédé de considérations qui mettent en relief la nécessité ' d adapter les connaissances des négociateurs de demain aux conditions d'un monde rénové. C'est là un problème qui, sous une forme ou sous une autre, se 1 pose dans tous les pays, Notre époque voit s'accomplir une révolution ; si profonde dans la structure politique et économique de la société ; humaine qu'il se pourrait, en effet, que les vieilles disciplines consti ' tuent une préparation insuffisante à son intelligence. Toutefois, ce serait une erreur de croire que la question de l'a formation technique des diplomates ne date que de notre temps. ; En France, elle fut débattue dès le siècle de Louis XIV. Le marquis ! de Torcy, neveu du grand Colbert et secrétaire d'Etat des Affaires : étrangères, créa en 1711 une Académie diplomatique qui Commença | à fonctionner l'année suivante. Le projet en avait été conçu, avec | une .extrême minutie. Les jeunes gens choisis par le roi, qu'on 1 appelait « Messieurs du Cabinet », travaillaient sur des pièces d'ar -1 ehives. Ils devaient en faire des extraits pour établir les droits et | prétentions de chaque pays, puis préparer des mémoires sur les questions litigieuses. En même temps, ils élaboreraient une collection des traités plus complète que celles qui existaient alors. Ainsi, tout en se formant à la pratique des affaires, ils effectueraient un travail utilisable. « Ils doivent, disait Torcy, puiser dans les sources et ne pas s'étonrfer de la grosseur des volumes qu'on leur proposera ». Cette innovation fut accueillie avec assez peu de sympathie. Les gazetiers en parlèrent sur un ton de .scepticisme. « Ces jeunes gens, observait le' Spectateur d'Addison, apprendront" le véritable usage, des grimaces politiques ». Et, en 1720, le cardinal Dubois supprima l'Académie diplomatique, vraisemblablement dans l'arriôre-pensée de 1 faire disparaître l'influence d'un prédécesseur. De cette brève expérience, un autre enseignement se dégage. Elle ■ se situe, ;en effet, à une époque où le mot « diplomatie » gardait l'empreinte de son étymologie. On désignait alors sous ce vocable deux disciplines fort différentes : Tune relative à la science des diplômes, c'est-à-dire des actes anthentiques, l'autre à la conduite des négociations internationales. Le fait linguistique jette ici une vive lumière sur l'idée qu'on se fit pendant longtemps des rapports entre souverains et Etats. La confusion entre la « science des diplômes » et la codification des usages de chancellerie date de l'extrême fin du dix-septième siècle ; plus exactement de la publication par Leibnitz des textes officiels intéressant les relations.internationales. A Leibnitz revient, en effet, l'honneur d'avoir clairement souligné l'importance des actes juri diques dans la oonduite des négociations entre les gouvernements. Dans les titres des recueils édités par lui et par Du Mont, le mot « diplomatique » s'applique à une collection de documents publics originaux. Mais, comme celte collection se rapportait aux relations internationales, on finit par considérer-l'expression « corps diplo matique » comme définissant non plus une compilation de textes, mais ia corporation chargée de les interpréter. C'est à Vienne et vers le milieu du dix-huitième siècle qu'on s'en serait, pour la première fois, servi pour désigner l'ensemble des ambassadeurs et envoyés accrédités auprès d'une. même Cour On trouve les mots « service diplomatique » employés en Angleterre, dans VAnnU-al Ttegister de 1787 pour qualifier le personnel des missions à l'étranger. En France, YHisloiH de la diplomatie française' publiée en 1809 par de Flassan, nous rappelle que « la diplomatie est l'expression par laquelle on désigne, depuis un certain nombre d'années, la .science des rapports extérieurs, laquelle a pour base les diplômes ou actes écrits émanés des souverains ». On n'avait donc pas perdu, au début du siècle dernier, le souvenir des origines de ce vocable. On s'étonnera qu'une institution aussi traditionnelle ait attendu si longtemps'le terme qui ia définit. La vérité est que la nature des relations, juridiques entre les communautés humaines a subi, dans les temps modernes, une .transformation fondamentale et que lo mot « diplomatie » nous est parvenu chaégé d'une signification dont les siècles révolus ignoraient les nuances et fâ complexité. L'histoire des institutions fait ressortir une antithèse entre deux types de relations sociales.que les juristes définissent chacun à leur manière. Les uns opposent l'Age du statut à celui du contrat, les autres l'âge- de la tradition à celui de ,1a discussion. Il n'est pas difficile de trouver le reflet de ces antithèses "dans les problèmes les plus controversés de la vie internationale contemporaine : les traités s'opposent aux principes, le dynamisme au 'statique, l'élan vital à la raison. On conçoit que la diplomatie soit amenée à réformer les disciplines, l'expérience et le vocabulaire sur lesquels elle a vécu. Mais, si la définition de la diplomatie est sujette à - variations, celle du bon diplomate garde sa teneur originelle. Elle requiert une qualité de jugement et un esprit de finesse qui sont de tdus les temps. Le négociateur actuel doit certes considérer le monde sous l'angle du rapport des forces et de la notion de souveraineté deuk concepts en pleine évolution. Néanmoins, il demeure, comme par le passé, un spécialiste des intérêts généraux. Jadis il bataillait pour des questions d'honneur ou de territoires. Aujourd'hui, il s'agit non seulement d'honneur et de territoires mais encore de prestige, de standard économique, de voleurs mobilières. Sans doute il dis pose d'une armée d'experts. Il ne saurait s'engager sans avoir pris l'attache du militaire, du marin de l'attaché commercial ou finan cier. Ces experts représentent avec distinction des sciences en for mation. On leur oppose d'ailleurs d'autres experts aptes à tirer "dets mêmes statistiques une conclusion inverse. Il appaitient au diplomate d'établir une équation claire entre' des variables aussi diverses que la science financière, le progrès du machinisme et la poussée de l'opinion. t Autrement dit, Je dernier mot reste à son discernement dès réalités et des hiérarchies qui les ordonne. Quelle que soit, par conséquent, l'école qui les aura formés, les diplomates auront plus souvent à s'inspirer de. leur intuition que d» leurs connaissances. diplomatie est la moins pondérable des expé riences. Sachant qu'une défaite au comptant peut être une victoire $ terme, elle ne vise ni aux gains immédiats ni aux succès spectaculai res. Su'- ia façade'du Quai d'Orsay, de grands panneaux en marbre ont été ménagés pour recevoir, comme sur un arc de triomphe, les fastes de notre histoire diplomatique. Ces panneaux sont restés vierges. On a considéré avec raison que la négociation' heureuse était celle! qui ne passe, au moment où elle est conclue, ni pour une victoire) ni pour une défaite....
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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