Extrait du journal

PARIS, 13 NOVEMBRE. Le tableau du commerce des Etats-Unis, pendant l'année dernière, vient d'être publié à Washington. Il atteste une diminution marquée dans les échanges des Etats-Unis avec les autres contrées, particulièrement en ce qui concerne les importations. Elles ont été cette fois de 534- millions ; pendant l'exercice 1841 elles avaient été de 672. Et pourtant on sait que depuis 1836, époque où commença la crise financière qui n'est pas terminée encore , elles ont diminué malgré l'accroisse ment de la population, qui en Amérique se développe plus rapidement qu'en France dans le rapport d'un à six. En cette année 1836 où les importations furent à leur apogée, elles s'élevèrent à 1 milliard 13 millions. On se souvient qu'en 1841 l'exportation générale en France, y compris ce qui était destiné à la réexporta tion , a été de 1 milliard 121 millions. L'exportation des Etats-Unis, l'an dernier, a été , en comprenant les produits étrangers réexportés, de 558 mil lions, et en ne comptant que les marchandises d'origine nationale, de 496. En 1841, l'exportation générale avait été de 651 millions, et celle d'objets provenant du sol ou des manufactures de l'Amérique du Nord, de 567. En 1836, elle avait été, pour le commerce général, de 686 millions, pour le commerce spécial, de 571. Le changement le plus remarquable qui se soit produit de puis 1836 dans la balance du commerce, consiste en ce que la disproportion est devenue beaucoup moins grande entre les importations et les exportations. Le pays autrefois recevait beaucoup plus qu'il ne restituait, et quelques personnes ont attribué à cette cause non moins qu'à l'exubérance des banques qui battaient monnaie avec du papier, la difficulté de fixer les mé taux précieux dans l'Amérique du Nord. Aujourd'hui on est à peu près dans l'équilibre. Le tableau du com merce américain présente entre le doit et l'avoir, vis à-vis des puissances étrangères , cette égalité qui, dans la plupart des cas , fait les bons comptes. Jusqu'à pré sent la balance s'établissait par l'exportation des mé taux précieux ou plutôt par les dettes que les Etats et les citoyens de l'Amérique du Nord contractaient envers l'Europe. Elle tend à se régler désormais par le seul ef fet des productions de l'industrie agricole ou manufac *UCette modification résulte, pour une bonne part, du ta rif des douanes que les Américains ont adopté. Ils se sont rangés sous la bannière de la protection. Us ont mis des droits équivalons à la prohibition pour quel ques articles. Le commerce étranger en a été vivement atteint. L'Angleterre, qui envoyait à l'Amérique du Nord une valeur de 421 millions eu 1836 et de 295 en 1837 ne lui a plus fourni en 1842 que pour 182 mil lions. La France, qui occupe le second rang dans le com merce des Etats-Unis, leur livrait des produits pour 195 millions en 1856 et pour 117 en 1837 ; elle ne figure plus sur le tableau en 1842 que pour 108. On voit que là perle de la France est sensiblement moindre que celle de l'Angleterre , comparativement à 1836 ; elle est pourtant de 45 pour 100. _ ; Il ne faut pas attribuer cette diminution de la con sommation des produits étrangers à la seule influence du tarif des douanes ; elle provient aussi, du moins à l'égard de la France qui expédie au dehors plus parti culièrement des objets de luxe, d'une heureuse modifi cation qui s'est introduite dans les habitudes. L'adver sité a rendu les Américains plus rangés. Les soieries françaises et les articles de modes de Paris ont été moins recherchés. Cependant le fait qui prime tous les autres et qui modifie le plus profondément les relations commerciales des Etats-Unis avec l'Europe, c'est l'entrée à pleines voiles de l'Amérique du Nord dans le système manufacturier. Elle ne l'a peut-être...