Extrait du journal

M. B rie u x vient de publier un livre qui, pour un livre de voyages, présente une nouveauté singulière : il nous parle des pays que l’auteur a parcourus. K 11 y a, en effet, deux manières de voyager : voyager pour apprendre, voyager pour oublier. Depuis Chateaubriand, la plupart des écrivains qui nous ont raconté leurs pcngTinations, étaient poussés plutôt par ce second motif. Ils cherchaient un moyen d'échapper h des spectacles trop connus, à des pensées trop banales. Ils le cherchaient, quand ils étaient romantiques, avec le secret espoir 'de ne le pas trouver. 11 n’y a rien dont un romantique puisse s affliger davantage que l'impossibilité où nous sommes d’néclapper à notre « moi », cette prison. Mais il est vrai que s’il parvenait à en sortir, il sc trouverait soudain étrangement malheureux et dénué. Son mal lui est nécessaire, ne serait-ce que pour s'en plaindre. Chateaubriand a promené, par delà les océans, sa désolation magnifique. Un de ses descendants les plus directs, M. Pierre Loti n’a fait que demander à tous les lieux de l’univers, des occasions de coûter la volupté douloureuse de se sentir vivre, passer, mourir. Et tout récemment, un disciple de ce génial neurasthénie, M. Julien Ochsé, clans son roman D'iU en ive, se prêtait mollement à ce bercement de la mer et des jours, où le? douleurs s’endorment, où les sentiments se défont..,...