Extrait du journal

Simultanément, sans entente ni préméditation il va y avoir à Paris trois exhibitions artistiques dignes de servir d’enseignement : le Salon, au palais de l’industrie ; l’exposition en faveur de V Œuvre des Alsaciens-Lorrains, à la Présidence de l’ex-Corps-Législatif ; la tentative de la Société anonyme des artistes au n° 35 du boulevard des Capucines. Pour l’indifférent, ce rapprochement que les circonstances nous suggèrent passera inaperçu ; mais pour celui qui, sans cesse, cherche des points de comparaison, des arguments, en faveur d’une chose sacrée : l’Art! il suscitera tout un monde de réflexions. La beauté plastique personnifiée par la statuaire, la vérité de la nature exprimée par la peinture, ont pu subir des traductions différentes, être interprétées par des génies en contradiction, les uns naïfs et charmants en leur naïveté, comme les Primitifs, les autres fougueux, comme les artistes de la Renaissance, d’autres encore inquiets, comme les maîtres contemporains ; mais ces diverses maniérés d’envisager l’unité absolue du beau : la Vérité, n’ont influé en rien sur la marche ascendante de l’Art. Ce dernier a résisté aux secousses les plus violentes, aux hérésies les plus audacieuses, aux compromis les plus louches. Eu dépit des schismes, des révolutions, des cataclysmes, il nous apparaît dans sa sérénité immortelle. Les interprètes indécis, les génies illuminant le monde, les aveugles vacillant à chaque pas sur le chemin sacré, tous ont passé, les uns oubliés, les autres couverts de la poussière des siècles, d’autres encore aussitôt morts que nés, quelquesuns émergeant à peine de la nuit du tombeau , l’Art, lui, est resté debout, parfois obscurci par ses desservants, mais toujours fort, toujours...