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La Croix, 26 mai 1896

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La Croix
26 mai 1896


Extrait du journal

Quand deux hommes, égaux d’ailleurs, travaillent ensemble, l’un des deux ne tarde pas à conduire l’autre. “m mille individus, abandonnés à euxmêmes, concourent à un but commun, ne fût-ce que celui de manger et de vivre, il surgit des chefs, une autorité se constitue suivant les lois de la hiérarchie naturelle ; l’établissement de cette hiérarchie est le résultat d'une lutte entre les plus forts, les plus habiles, les plus économes. Les faibles, dans les sociétés barbares, sont toujours sacrifiés; ils ne font que changer de maîtres, au milieu de combats, incessants. m • m Quand la civilisation progresse, la hié rarchie s’organise et devient plus stable; elle tend à s'exempter de l’empire de la force ou des caprices du hasard. • * * * Lc3 peuples anciens avaient adopté le système des castes infranchissables. Le christianisme ne manqua pas d’adoucir une pareille dureté et son action se fit sentir dans l’organisation féodale. Trois classes se constituent sur les débris du vieux monde : au lieu de l’esclavage détruit, une classe de laboureurs, les serfs, de plus en plus indépendants; la bourgeoisie adonnée au commerce; l’homme de guerre qui paye de son sang et devient le chevalier, le noble. Les trois classes n’étaient pas fermées, on pouvait passer de l’une à l’autre. L’idée première, la grande pensée, c’était la hiérarchisation de là société par le3 ser vices rendus. Les services, la gloire, s’additionnaient de génération en génération pour constituer un véritable patrimoine d’honneur ; ils fixaient la condition de la famille: ils. ne devaient pas être récompensés en argent. • .» Telle était la donnée idéale inspirée par les traditions de la chevalerie ; malheureu sement faussée depuis quand les besoins financiers des' princes les amenèrent à tra fiquer des anoblissements. A côté des représentants des vieilles races appauvris au service de l’Etat, on vit alors s’étaler une foule d’usurpations dorées et des titres achetés. La hiérarchisation par l’argent commen çait. Elle ne fit qu’aller en grandissant : le luxe dé la cour amena la nécessité des alliances avec les financiers, et quand arriva la révo lution, la vieille et fière devise : « Honneur passe richesse », n’était phxs qu’à moitié vraie. * • * Aujourd’hui elle ne l’est plus du tout : ce qui différencie les familles c’est unique ment la fortune. Les grands noms s’offrent aux filles des hommes de bourse et des juifs. Du haut en bas de l’échelle chacun cherche à s’enrichir par tous les moyens; le jeu, les spéculations hasardeuses, les entreprises les plus étranges conduisent parfois à la for tune, souvent à la ruine : les décavés en sont quitte pour disparaître. Tout comme en Amérique, cela va très vite : voyez ce riche : il l’est pour quelques années seulement; peut-être pour quelques jours : aussi, comme il jette l’argent par les fenêtres 1 Le plus triste, c’est qu’il donne le ton ; il disparaît : d’autres le remplacent et les choses sont ainsi montées an point de vue du monde et de la mode ! Voilà bien le règne des parvenus 1 * m « Le gros du peuple est étranger à ces évo lutions, sinon par les tristes exemples qu’il en recueille. U né monte pas plus rapidement qu’autre-...

À propos

La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.

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