Extrait du journal

plines morales,, défendait la liberté individuelle contre le. césarisme, ils ne s’endorment aujourd’hui dans la béate possession d’une tranquillité de surface: notre ordre apparent cache un désordre de fond, et notre civilité une pourri ture. Mais qu’on ne s’y trompe pas. Pour redresser les voies de l’huma nité, nous aivons une ferme mé thode qu’ont éprouvée les siècles. La tentation est grande, et quel ques-uns y cèdent, d’attribuer aux formes nouvelles de la vie des scandales qui n’en sont que l’abus. On crierait volontiers ana thème au progrès technique, à l’économie moderne, à la rationa lisation, au crédit, à l’argent, au bien-être, comme Savonarole, ému des misères de son temps, jetait l’interdit sur le luxe de la Renais sance. Une telle étroitesse de vue, en se plaçant sous le patronage de l’idée religieuse, la compromet trait infailliblement. Non. Tous ces développements de la civilisation étaient inclus dans la pensée créatrice. La so ciété sortie des mains de Dieu ne s’arrête plus en cours d’évolution, et-l’Eglise l’accompagne dans sa route. Sa méthode n’est point de bloquer le mouvement, mais de le diriger, (Te le freiner parfois, dé l’accélérer souvent, en se mettant à sa tête, Ma de sa tenir en queue. Moyens perfectionnés, progrès du bien-être, développement; de la consommation, utilisations de tous ordres, élargissement de la vie, tout cela est créature de Dieu, vient de lui, et la seule condition que nous avons, nous, chrétiens, à réaliser pour garder à ces bien faits leur légitimité, c’est de faire qu’ils reviennent à Dieu, je veux dire qu’ils y conduisent les hommes. La voilà, la morale dans les affaires. Cette finalité est tout le problème. Et, pour n’en prendre qu’un très simple aspect, le profit, le gain, recherché par tous avec un tel appétit et une telle absence de choix qu’il mène aussi bien le vo leur à la tire en correctionnelle que le "ministre en Haute Cour, n’a rien en lui-même que de très légitime. Et la Semaine sociale, j’en suis sûr, le dira. Mais, pour qu’il ne corrompe pas ses voies et que ces voies mènent l’individu, seule valeur d’éternité, à sa fin, le profit requiert deux conditions : d’abord des moyens sélectionnés, ensuite, la soumission à la fin propre de la production. Le choix des moyens ! Il n’y a pas une morale des affaires, il y a la morale ! Elle a le même vi sage, sérieux et exigeant, dans les relations économiques, dans les relations d’homme à homme, dans la vie secrète de chacun. Et, qu’il s’agisse de la tenue de sa con science, du cœur d’autrui ou d’un ballot de marchandise, la balance où se pèse , l’acte qu’on va com mettre n’a pas de poids vérifiés à des poinçons différents. La fin propre de la production ! Elle est double : faire vivre son homme, car la loi du travail porte en elle sa. récompense, mais aussi faire vivre l’humanité, mettre à sa disposition les ressources^ de la nature. Si la production refuse de re prendre conscience de sa fonction sociale et n’envisage' pas une autre, économie que l’économie de profit qui nous vient du siècle der nier et qui est fille de l’individua lisme révolutionnaire, elle nous mène tout droit au bolchevisme. Et, en attendant, elle nous donne cette belle crise économique dont nous ne voyons pas le bout. Le producteur ne produit pas que pour lui. Et c’est parce qu’il a oublié d’adapter sa production aux «besoins du monde, surtout d’en assurer la distribution ration nelle. que le monde aujourd’hui tremble sur ses bases. Que, sur un point de l’univers, on chauffe les locomotives avec le blé en excédent et que, -sur d’autres points, des millions de chômeurs crèvent de faim, c’est le signe que le régime économique n’est plus à la hauteur de se tâche providen tielle. Avant de crier au socialisme, il i faudrait commencer par ne pas...