Extrait du journal
Le nouveau Gouvernement de Rassemblement populaire s’est présenté devant le Parlement. Il a eu sa majorité à la Chambre. Le Sénat s*est montré assez froid, presque glacial. Mais les problèmes de l’heure sont-ils résolus ? On peut hardiment affirmer le contraire. Tout le monde proclame à l’envi que l’union nationale est chose souhaitable dans les heures difficiles que nous traversons ; mais le bloc socialo-communiste de la Chambre, et sans doute une petite fraction de Valoisiens, ne l’acceptent que sous la houlette de M. Léon Blum, tandis eue les groupes minoritaires de la Chambre et l’immense majorité du Sénat la désirent avec un champion moins discuté. Au fond, toute la question est là, et n’est que là, car si on était d’accord sur l’homme, les difficultés de programme disparaîtraient aussitôt. Nous n'avons, ici, aucune animadversion particulière contre la personnalité de M. Léon Blum, dont nous ne méconnaissons ni le talent, ni le caractère. Mais les résultats de son premier gouvernement de Rassemblement populaire sont loin d’être réjouissants, et nous redoutons davantage encore ceux de son second. Ses intentions sont certainement pures lorsqu’il parle de réunir toutes les forces de démocratie, mais le vrai c’est qu'il ne réussit qu’à grouper les forces de démagogie ou à peu près, ce qui n’est pas la même chose. Nous n’avions pas besoin d’un Cabinet de trois douzaines de minis tres et sous-ministres — et encore il y a des mécontents qui n’ont pu être servis — surtout dans la situation financière où nous nous trouvons. Une éauinc réduite, avec un programme minimum qui aurait fait se tendre toutes les énergies, pour sa réalisation rapide, eût beaucoup mieux fait notre affaire. Nous venons de parler de programme, et nous sommes ainsi conduits à jeter un coup d'œil sur la déclaration ministérielle, qui a provoqué, du reste, bien des désenchantements.. Qu'y trouvons-nous ? Après le traditionnel couplet sur la paix, voici qu'on nous offre : poursuivre le code moderne du travail ; projet équilibré — au moyen de quoi ? — sur la retraite des vieux travailleurs; extension des allocations familiales ; condition des exploitants et des ouvriers agricoles, ainsi que des petits commerçants, et ce alors qu’on n'a pas le premier sou pour alimenter la caisse autonome de la Défense nationale ! Si désireux que nous soyons de voir se réaliser au plus vite les réformes intéressant les vieux travailleurs, le monde agricole et les pcti*s commerçants — et malheureusement l’amélioration de leur sort a été grandement compromise par les résultats décevants de la gestion du Front populaire — nous ne pouvons nous empêcher de répéter qu’il n’y a que deux questions qui soient réellement capitales dans les heures tra giques que nous vivons : la situation financière et la défense nationale. Tout le reste n'est, présentement, qu’on le veuille ou non, que verbiage et poudre aux yeux, car on sait pertinemment qu’on ne peut rien faire. Restaurer nos finances et parer à tous les dangers d’une situation extérieure menaçante, tels doivent être les deux articles de notre < credo * Or, pour restaurer nos finances, il faut Inspirer cbnfiance au monde de l’épargne, de même que pour assurer notre sécurité il nous faut la collaboration intime et urgente du monde du travail. Tout est là. Le nouveau Gouvernement de M. Léon Blum est-il habile à mener rapidement cette double besogne à bien, que M. Paul Reynaud définissait ainsi à la Chambre : « Vous croyez, à gauche et à droite, que l’on peut résoudre les problèmes d’aujourd'hui avec une majorité orientée soit à gauche, soit à droite. Vous vous trompez tous. On ne peut, en effet, résoudre les problèmes d'aujourd'hui que par l’unanimité. Vous êtes indispensables les uns aux autres. » Où est l'homme de cette unanimité ? Il y en a eu, jadis : Clemen ceau. Poincaré, Briand, qui ne parlaient pas au nom d'un parti, fût-il le plus puissant en nombre. M. Léon Blum, à tort ou à raison, est-il capable aujourd’hui de réaliser cette synthèse ? Les uns répondent oui, les autres non. Nous demandons cet homme, même s’il n’est pas du plus grand parti, parce que. au-dessus des partis, il y a la France, et qu’elle ne peut plus attendre. P.-S. — Après les événements d’Autriche, voici que les regards ro tournent vers la malheureuse Espagne, où les événements catastro phiques semblent vouloir se précipiter. Et des nuages se lèvent aux confins de la Pologne et de la Lithuanie. Devant tous ces événements, le Gouvernement restera-t-il ferme et sensé ? C'est lc cas de dire « qu’il n’y a plus une bêtise à commettre. »...
À propos
Fondée en 1893, La Dépêche du Berry était un journal régional suivant une ligne éditoriale de centre-gauche, ou « radicale ». Il paraît jusqu'en 1944.
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