Extrait du journal

A la veille des élections municipales Qui vont avoir lieu dans toute la France, excepté, hélas! à Paris, — le chef du pouvoir exécutif a voulu parler au pays. Il l'a lait de la voix calme, grave, dou loureusement émue, à la fois ferme et conciliante, clémente et sévère, que vou laient les circonstances. Nus lecteurs ont déjà pu juger ce dis cours, sur la rapide analyse que nous en avons donnée dès hier. Ils le jugeront mieux encore sur le texte officiel que nous reproduisons aujourd’hui. M. Thiers a porté à la tribune la con firmation solennelle du langage qu’il avait tenu, des engagements qu’il avait pris, des promesses qu’il avait faites, dans ses entrevues avec les diverses dé légations parisiennes. Sans se départir de l'attitude énergique et résolue que lui impose sa situation comme chef du gou vernement régulier de la France, il a su la tempérer par des paroles de paix, à l’adresse des concitoyens égarés qu’il est forcé de combattre. Il les a encore une fois rassures centre les périls imagi naires dont on est parvenu à leur faire croire que la République est menacée. Il a écarté toute pensée d'animosité, toute perspective do vengeance, de la ré pression à laquelle l'oblige de recourir le loi inflexible du salut national. Pas un mot irritant ou provocateur n'est tombé de ses lèvres ; et la patriotique émotion dont son âme était visiblement possédée, lui a fait trouver des accents aussi éloi gnés de l’acrimonie que de la faiblesse, pour dépeindre la position la plus cruelle peut-être où jamais un grand pays se soit vu. Il nous parait impossible que totte puissante évocation de la vérité n’ouvre pas enfin les yeux, mémo aux plus aveu gles; que ce suprême appel à la pacifi cation n’éveille pas un écho, jusque dans les cœurs les plus irrités par la défiance et la lutte. L’effet produit par la parole de l’orateur sur les membres de la gaucho la plus avancée et sur les représentants parisiens eux-mêmes, est, en ce sens, un premier triomphe que nous aimons ù accueillir comme un heureux augure. L’accueil fait au discours de M.Thiers, par la généralité de l’Assemblée, atteste d’ailleurs que la pensée qui anime le chef du pouvoir exécutif est aussi la pen sée dominante parmi la représentation nationale. Si une inspiration peu oppor tune a conduit quelques instants après à la tribune un député de la droite, pour formuler des réserves éventuelles au nom de scs amis politiques, cet incident j lui-même n’a servi qu’à mieux mettre eu relief dans quelles di-positions se trouve et vers quelle solution incline la très grande majorité. La vérité des situations respectives est désormais établie. Le malentendu qui a donné une partie trop considérable de la garde nationale et du peuple de Paris pour auxiliaires aux faux prédicateurs de la Commune, n’a plus ni raison, ni prétexte. L’égoïsme do quelques inté rêts individuels et l'aberration de quel ques esprits exaltés, rebelles même à l’évidence, pourraient seuls prolonger les calamités où ce malentendu nous a précipités. 11 appartient à la masse de la population de répudier avec éclat cette poignée d'obstinés de la guerre civile, pour les empêcher, en les réduisant à l'impuissance, de fermer plus longtemps la voie de la réconciliation qui s’ou vre devant nous....