Extrait du journal
réduit la France, elle eut peur de perdre son hé gémonie sur les mers et se mit à nos côtés pour réduire les ambitions du Reich. La seule grande bataille qui mit les deux flot tes en présence prouva que l’Angleterre n’avait pas eu tort de craindre. Aussi fut-elle heureuse que la victoire obtenue sur terre lui permît de faire prisonnières les escadres ennemies. Si l’Allemagne est loin de posséder une flotte de guerre comparable à celle qu’elle avait en 1914, il faut avouer que malgré les obligations du Traité de paix, elle a su tourner la défense et construire des vaisseaux qui montrent sa puissance et surtout sa volonté de reprendre son rang parmi les gran des marines mondiales. Jusqu’à présent, elle cachait presque ses vais seaux de guerre, se contentant de manifester son reqouveau maritime par le lancement de nombreux et puissants bâtiments de commerce. Le plan Young signé, ratifié, pourquoi garder pareille réserve ? Ce n’est plus la mer du Nord, l’Otéan, qui sont les témoins de cette résurrection maritime. C’est notre Méditerranée, notre mer latine, où le Reich n’a aucune obligation de venir, qu’il a choisi pour une croisière, triomphale elle aussi, de sa première grande flotte de guerre. Dix croiseurs cuirassés, du plus dernier modèle, c’est-à-dire en puissance d’armement et en vitesse supérieures à la moyenne des croiseurs anglais ou français, parcourent la mer qui nous unit à nos possessions d’Afrique : Maroc, Algérie, Tunisie, comme pour reconnaître le chemin à l’avance, ou pour montrer aux nations étrangères une puis sance recouvrée. Nos anciens combattants, à leur retour d’Al gérie où se tenait leur Congrès annuel, ont eu ce spectacle vraiment angoissant d’une flotte de guerre allemande déployant sa force sur les flots de notre mer latine, et ils ont pu se demander ce que sera demain, si déjà aujourd’hui, malgré les traites, on leur permet cet étalage guerrier. * % Le Traité de Versailles !... 1919 !... Comme c’est loin I On oublie aussi que l’Allemagne ne devait plus avoir d’aviation militaire, ni de dirigeables de guerre. Oh 1 elle ne les fabrique que pour des buts pacifiques, pour ses relations commerciales. Qui dira la différence qu’il y a entre un avion de commerce et un avion de guerre ? Entre un dirigeable pacifique et un Zeppelin meurtrier ? L’armement et la transformation de ces engins sont si faciles et si prompts qu’en quelques heures la flotte aérienne commerciale peut devenir une flotte guerrière formidable. Or, cette force aérienne, l’Allemagne en est si fière qu’elle tient à la montrer au monde entier, et en particulier aux Français et aux Anglais. En vérité, notre Gouvernement, comme celui de Londres, n’a plus de mémoire. On a oublié totalement 1914, et les terribles nuits pendant lesquelles l’épouvante s’apesantissait sur les foules de Paris et de Londres, quand les Zeppelins venaient semer leurs bombes. En effet, le 26 avril, un nouveau Zeppelin est venu sur Paris et sur Londres avec toutes autori sations des Gouvernements français et anglais, en plein jour, pour montrer sa puissance colossale. A midi précis, il nous a été donné de voir le mastodonte de l’air faire son entrée au dessus de Paris. Il voyageait lentement, très bas, entre deux et trois cents mètres, et après avoir traversé Pa ris, il revint et, pendant près de vingt minutes, survola la capitale, terminant sa visite en montant les Champs-Elysées pour passer sur l’Arc de Triomphe de l’Etoile, parcourant ainsi dans les airs le trajet que les armée^Soches rêvaient de parcourir si elles étaient entrées à Paris. Les réflexions du peuple, qui, à cette heure de la journée, était dans la rue, à la sortie de l’usine, de l’atelier ou du bureau, étaient symptôraatiques. Quelques-uns appréciaient avec une verdeur digne des anciens poilus cette visite surprenante. Beaucoup rappelaient le souvenir d’épouvante des anciens Zeppelins. Dans quelques quartiers même, il y eut des bagarres ; quelques Allemands trop orgueilleux ayant voulu manifester publique ment leur joie, furent mis à la raison par des pa triotes indignés. Comme la flotte de croiseurs cuirassés en Mé diterranée, que venait faire sur Paris ce dirigea ble qui nous rappelle de si mauvais souvenirs ? Reconnaître le terrain pour, l’occasion se pré sentant, mieux savoir où placer des bombes ? C’est ce que se demandèrent ceux qui virent des cendre le sac postal si bien lancé à l’endroit con venu. On n’avait pas besoin de ce spectacle à Paris, et notre Gouvernement eût été mieux inspiré s’il l’avait interdit. Pauvre Allemagne 1 Comme elle est à plaindre 1 Elle n’a pas d’argent pour payer ses dettes envers ceux qu’elle a voulu ruiner, qu’elle a pillés, dont elle a dévasté les pays, incendié les villes. Mais elle en a, et en abondance, pour construire de coûteux Zeppelins et des flottes de guerre !... Dire qu’il y a encore chez nous des gens assez naïfs, assez oublieux du passé, pour nous parler de la pa cifique Allemagne et pour plaindre la « pauvre Allemagne » I... Que leur faut-il ?......
À propos
Lancé en 1878, La Gazette de Château-Gontier fut un bihebdomadaire, puis un hebdomadaire local. Collaborationniste pendant l’occupation, il est interdit en 1944.
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