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La Petite République, 9 août 1903

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La Petite République
9 août 1903


Extrait du journal

Les événements de Lorient,que la presse réactionnaire grossit et exploite à plaisir, eussent été facilement évités avec un peu de tact et de sens démocratique. Si dès le début de la grève, les autorités administratives et judiciaires avaient considéré les travailleurs non comme des suspects et des rebelles, contre lesquels toutes les forces de répression doivent, sans examen préalable, par principe, se dresser aussitôt, mais avaient vu en eux ce qu’ils sont en réalité, des citoyens usant d’un droit légal, et d’autant plus di gnes de la sollicitude d’un gouvernement républicain qu’ils défendent le pain de leurs familles, les conflits avec la troupe eussent été évités, pour cette excellente raison que la troupe fût restée chez elle. Je vous demande un peu le mal que fai saient ces braves travailleurs en prome nant â travers les rues de leur commune le drapeau de leur syndicat ? Ce drapeau est rouge ! Quelle catastrophe ! S’il était bleu, vert ou jaune, la terre continuerait de tourner, mais il est rouge ! Qu’on nous dise donc qui cette exhibi tion gênait. Quels principes sacrés, intan gibles et mystérieux mettait-elle en péril ? Hennebont n’est habité que par les gré vistes et les commerçants qui vivent d’eux. Aucune organisation adverse n’existant, aucun heurt n’est à redouter. M. Waldeck-Rousseau a fort bien ana lysé, un jour, devant la Chambre, la si tuation d’une ville en grève. Suivant lui, le plus sûr moyen d’y maintenir l’ordre est encore de laisser libre cours au besoin de mouvement, d’exubérance qu’éprouve inévitablement une foule ouvrière. Mille, deux mille, dix mille hommes et femmes qui suivent une route, qui chantent, qui Soussent des cris, ne sont pas à craindre, la condition qu’ils marchent, qu’ils crient, qu’ils chantent à leur gré. Mais Su’on les moleste, qu’on les énerve par es tracasseries, qu’on prétende les priver sans motif plausible d’une liberté à la quelle ils tiennent d’autant plus qu’elle est le meilleur moyen pour eux de se sou tenir mutuellement, la colère les prendra, et sous prétexte de rétablir l’ordre que rien ne troublait, on aura en réalité dé chaîné l’émeute. C’est ce que cherchaient les patrons et les réactionnaires de la région. Ceux qui douteraient n’ont qu’à voir le zèle avec lequel la presse cléricale grossissait les moindres incidents et dénaturait les faits. A lire, par exemple, ses comptes rendus de la journée d’avant-hier, on croirait que les grévistes sont les auteurs responsables des bagarres survenues dans les rues de Lorient, alors qu’ils attendaient en paix à Hennebont le résultat des démarches du préfet. Le Temps, la Liberté, les Débats, la Libre Parole, VAutorité, le Figaro, la Croix, tous semblent obéir à un mot d’ordre. Le Temps va jusqu’à pressentir que la République ne s’en relèvera pas. Èntend-il par là qu’elle ne saurait vivre si elle ne met à la raison les ouvriers, et comment conçoit-il cette opération ? Dans l’alternative de laisser toute latitude aux manifestations ou de les disperser à coups de fusil, quelle solution propose- t-il ? Il répondra que des brutalités ont été commises sur les personnes et que des mai sons ont été saccagées. Il conviendrait de contrôler sur place ces allégations. En tout cas, rien n’établit la responsabilité directe des grévistes. Et il est manifeste quo les violences commencèrent après qu’on eut interdit les cortèges et entravé les réunions. Si la République usait à l'égard des tra vailleurs des procédés de l’empire, elle se frapperait elle-même à mort. Surtout lorsque sa cause se confond avec la leur, comme à Lorient, où les ennemis des gré vistes sont ses propres ennemis. Sait-on que les revendications de la S*ève portent sur un total de 16 francs ? ui, si les patrons donnaient satisfaction aux ouvriers, il leur en coûterait IG francs ! C’est pour épargner IG francs qu’ils médi tent un massacre. GÉRAULT-RICHARD....

À propos

La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.

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