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La Petite République, 9 septembre 1888

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La Petite République
9 septembre 1888


Extrait du journal

désir de lire, craignant quelque révélation douloureuse qui blessât la religion de son deuil. Pourtant la curiosité l’emporta. Elle déchira l’enveloppe et lut ccs lignes î « Je vous écris pour vous gronder, mon cher Maurice. Samedi dernier, après la ré« pétition d'Andromaque, j’ai couru pour vous retrouver, bien vile, jusqu’à ce vilain square Montsouvis (pie j’aime, puisque c’est là qu’on vous rencontre. Je me dépêchais, j’étais heureuse à la pensée de vous revoir. J’avais , comme toujours, mille choses à vous dire. D’abord, je désirais un conseil pour mon rôle, puis je voulais rire avec vous de la niaiserie de ce pauvre Oreste qui continue à me aire sa cour. Enfin, j’allais vous conter tous nos petits potins de cou lisse, qui vous amusent et que j’ai tant do plaisir à rabâcher quand je suis à votre bras. » Pourquoi donc ne vous ai-je pas ren contré, mon cher Maurice, dans notre allée, au bord du lac ? Je vous ai attendu, toute triste, jusqu’au moment où i’on a battu le tambour et fermé les grilles. Un gardien m’a mise à la porte. Je suis rentrée très tard à la maison, et mon père m’a dit cent sottises en mâchonnant sa moustache do vieux soldat. » Enfin, lundi, nous avons joué votre pièce. Votre élève a fait ce qu’elle a pu.Elle a été tantôt bonne, tantôt mauvaise. Une foule de gens l’ont félicitée au foyer : des amis, des journalistes, des inconnus; mais celui qu’on attendait n’est pas venu. » Je ne puis croire que vous êtes fâché, et ne vous veux pas malade. Donc, ce soir à cinq heures, je vous attendrai dans l’allée du lac. » Ne manquez pas cette fois, car, voyezvous, j’ai beaucoup pleuré, ce vilain soir do la semaine passée, toute seule, en m’en re tournant. » C’était tout. Ce jour-là même où elle l’avait vainement attendu, le mal venait de le surprendre et de le terrasser; et il était déjà dans le cer cueil quand la petite actrice le cherchait encore des yeux parmi les spectateurs du théâtre. La lettre lue avait glissé jusque sur le tapis, et la vieille dame se sentait gagner par un attendrissement étrange, consola teur, très doux, cn songeant que son fils n'était pas tout à fait disparu, puisque dans le monde, quelqu’un l’a tien lait en core....

À propos

La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.

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