Extrait du journal

Aurons-nous des œufs cet hiver ? Le Petit Journal pose la question et fait remarquer que les prix d'été de 1917 sont plus élevés que ceux des gisons correspon dantes. Que sera-ce, 3b demande notre confrère, quand, le mauvais temps revenu, la ponte aura diminué ? Ce serait le cas ou jamais de proposer l'application de la vieille recette pour la fabrication des œufs artificiels. Vous sa vez... On fait le blanc avec du plâtre, la coquille avec dé la chaux... — Et le jaune ? interroge vivement la naïf, pressé de s'instruire. Et le curieux est bien attrapé quand on lui apprend avec quoi l'on fabrique le jaune des œufs artificiels... Cependant, nous n'en serons pas réduits: à de tels expédients si l'on arrive à trans porter en France des œufs du Maroc et des œufs de Russie. Pour ces derniers, leur importation paraît bien aléatoire. Outre que les Russes n'ont pas dû faire leur ome lette sans casser beaucoup d'eeufs, ils ont, pour le quart d'heure, d'autres préoccupa tions que celle de faire pondre les poules ; au surplus, il est vraisemblablement assez difficile de faire venir des marchandises de Russie, sans quoi, nous n'aurions pas manqué de blé pour la fameuse soudure. Reste le Maroc. Les œufs du Maroc sont petits. Mais ils sont excellente. On pourrait s'exprimer à leur sujet comme Musset sur Hassan : ... on eût dit que la poule Le faisait tout petit pour le faire avec soin. Tout, est donc pour le mieux, penserez-, vous. : x Sans doute, mais de même que pour goû ter les noix du Fabuliste « il faut les ou vrir », avant de pouvoir ouvrir, puis con sommer les œufs marocains, il faut les emballer. Or, nous affirme-t-on, le Maroc, ce riche pays minier, manque totalement de produits d'emballage. Bon ! Mais le gouvernement veille à tout : il fait fabri quer les caisses dans les Landes : 20.000 de ces caisses sont prêtes à partir pour l'Empire chérifien Vous voilà rassurés. Seulement, voilà bien d'une autre. Il n'y a pas de wagons pour transporter les cais. ses vides. Et, quand on en aura trouvé pour cet objet déterminé, s'en procurera, t-on quand il s'agira de ramener pleines d'œufs africains les caisses landaises ? Ici, le problème se complique, car pour peu qu'on fasse attendre les colis deux ou trois mois sur les quais d'embarquement, les œufs naturels qu'ils renfermeront offriront sans doute certains points de comparai, son avec les œufs artificiels plus haut ci tés... Et la conclusion qui s'impose après cea quelques remarques est que nous pourrions bien, cet hiver, payer les œufs dix sous pièce. Le public n'y verra, d'ailleurs, au. cun inconvénient. Les œufs à cinquante centimes ? On n'y- fera même pas attention, tant on sera occupé à discuter sur le jour nal à deux sous ! Marcel de Bare...