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La Quotidienne, 18 janvier 1834

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La Quotidienne
18 janvier 1834


Extrait du journal

force supérieure à la sienne. La voilà réduite à ne point oser pa raître en public avec son ministère ; encore quelques jours, et il faudra le chasser, il faudra obéir à Llauder, il faudra non pas choisir un ministère nouveau, mais accepter, mais subir des mains de la révolution celui qu’elle voudra imposer. Qu’on ne dise donc plus que c’est seulement un changement de personnes, que c’est une personne à la place d’une autre, la gracieuse reine Isabelle au lieu de Charles V. N an, c’est un prin cipe à la place d’un autre principe. Ni Christine ni Isabelle ne régnent : la reine d’Espagne, en ce moment, c’est la révolution. On ne change point les faits avec des paroles ; quand il y a deux principes debout, les personnes ne sauraient plus que se ranger sous l’un de ces deux drapeaux. Avec la légitimité monarchique Charles V, Christine et Isabelle avec la révolution ; la révolution sur le trône, si vous voulez, c’est-à-dire sur quatre planches couvertes de velours ; la révolution couronnée, si vous voulez , c’est-à-dire la révolution un peu plus dangereuse parce qu’elle souille les insignes de la monarchie; mais ce n’est pas moins la révolution, toute la révolution, rien que la révolution. Et sent-on bien tous les dangers que le principe révolutionnaire traîne à sa suite en Espagne, toutes les tempêtes qu’il peut soule ver, toutes les catastrophes qu’il peut produire? Sa rappelle-t-on bien que dans l’époque où nous sommes, toute crise particulière a son contre-coup dans la politique générale , que la révolution espagnole aurait du retentissement au-delà des Pyrénées , que , d’autant plus violente qu’elle rencontrerait des résistances plus énergiques, elle aurait des conséquences dont on ne peut calcu ler la portée? Ce sont là des considérations puissantes dont tout le monde peut apprécier la justesse; des résultats que tout le monde doit craindre, et cependant ces résultats sont inévitables tant que la cause qui les contient demeurera debout. L’usurpa tion ne pourra jamais s'appuyer que sur la révolution, la révo lution produira ses conséquences naturelles, elie vendra ses se cours avares à cette monarchie parasite qui vient les lui deman der, elle jouera son jeu, poussera les hommes et les événemens vers le but où elle tend par politique et par instinct. Ce n’est plus là une éventualité qu’on annonce, urne hypothèse qu'on présente, la situation marche devant ceux qui niaient le mouvement. Christine est aujourd’hui beaucoup plus révolution naire qu’elle ne l’était hier, beaucoup moins qu’elle le sera de main. Aujourd’hui Llauder menace et ordonne, demain il y aura vingt Llauder. Le principe est là qui domine tout, conduit tout, décide tout. Le système de la diplomatie qui ne voyait qu’une que relle de famille dans la lutte du droit de Charles V contre la rébel lion de sa belle-sœur, est à peu près aussi profond et aussi habile que le système doctrinaire exprimé par le Journal des Débats, qui prétendait que toute la question dépendait de la résolution de l’armée. Celle-là s’imaginait que parce que l’on conservait le nom de royauté et ia forme monarchique, le reste a’était rien. Celui-ci pensait que l’on pourrait sans guerre extérieure, sans triomphe, sans gloire, remplacer le principe de la légitimité par un despotisme militaire. Ni les uns ni les autres ne s’apercevaient que les deux seules puissances étant la légitimité et la révolution, ces deux pôles attireraient à eux tout le reste; que la reine régne rait pour la Révolution en croyant régner pour elle-même, que l’armée se battrait pour la Révolution en croyant se battre pour la reine, et qu’enün tout le mouvement politique était engage dans ces voies, où Llauder et la Catalogne vont peut être faire un si grand pas. Qu’on ne demande pas ce qu’ont fait, où ont été les légitimis tes espagnols dans ces circonstances difficiles. Ils ont été là où il fallait être, protestant les armes à la main,combattant et mou rant pour leur droit national. Leur conduite a été tout à la fois intelligente et honorable, courageuse et loyale. Laissés avec leurs propres ressources, ils ont organisé sur tous les points la résistance, sur quelques points la victoire. Les légitimistes espa gnols ne se sont point manqué à eux-mêmes, ils n’ont point manqué à la cause de la monarchie; iis peuvent en attester tant de combats livrés, et tout récemment encore la mémorable ren contre de Los-Arcos. Mais les légitimistes espagnols, mais l’Es pagne, mais tous les royalistes de l’Europe, a’ont-ils pas le droit de demander : qu’ont fait les rois ? où sont les rois ? Pourtant c’est le principe monarchique qui est en cause, nous ne cesserons point de le dire et de le redire, parce que nous...

À propos

Publié d’abord sous le nom La Quotidienne en 1792, ce journal royaliste est l’organe principal de Joseph-François Michaud. Historien des croisades, ce dernier est d'abord républicain, puis devient royaliste par hostilité à la Convention. Ces revirements firent changer le journal de nom plusieurs fois durant la Révolution, l’Empire et la Restauration avant de retrouver, en 1814, son titre initial. En 1815, le journal devient la Feuille du jour.

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