Extrait du journal

Pour plus de sûreté, il avait voulu présider en personne au choix de ces divers crus. Soit de concert avec le sommelier, soit en agissant seul, il avait inspecté la cave, disant qu’il ne fallait rien épargner pour que le comte fût content. Un seul des domestiques, qui, chose étrange, se trouvait sans cesse sur son chemin, avait manifesté son étonnement à la vue de tant de zèle. On l’a deviné, celui-là ne pou vait être que Joë, le valet do chambre de Sa Seigneurie ou son majordome, au choix. Ce brave garçon, sans manquer de respect à M. le secrétaire, lui avait demandé de ne pas empiéter sur les emplois d’autrui. — Sir Edgar, lui avait-il dit,les vins, ça regarde spécialement Thompson. Il n’est pas nécessaire do se donner tant de peine pour si peu ; Thompson est là. Monsieur le secrétaire n’a qu'à attendre l’heure du souper et à ne se préoccuper de rien autre chose. — Mais, Joë, si je sors de mes habi tudes, vous savez bien que ce n’est que pour faire plaisir à milord. — Sir Edgar, tous tant que nous sommes ici, nous connaissons les goûts de Sa Seigneurie, allez ! Ludding n’avait rien répliqué, mais il avait continué à agir. On le voyait courir partout, même aux cuisines. — Voilà un beau zèle, disait tout le château. — Un zèle dont je me méfie, disait joë tout bas. Qu’y a-t-il donc dans cet empressement inusité ? Est-ce qu’il veut encore une fois griser milord ou bien le faire mourir d’indigestion ? Et c’était après cette observation qu’il s’était mis en devoir de suivre Edgar pas à pas. — Qu’il désigne les vins à boire, soit, mais qu’il n’y touche pas i reprenait Joë. A un certain moment, il surprit...