Extrait du journal

ble ami qui est bouquiniste. Pareil à ces épouvantails rustiques que battent les vents, que lavent les pluies, que mordent les bises, que rissolent les soleils impitoyables, il est là, par tous les temps. Sa vieille figure maigre, ridée, boucanée par les intempéries et pareille à celles que les trimardeurs sculptent dans une racine grise et terreuse, émerge d'une pèlerine qui semble taillée dans de la bure à capucin. Dans ses boîtes, il y a de ces innocents trésors qu'achètent les bibliophiles pauvres: estampes poussiéreuses à 0 fr. 25, tomes dépareillés de « l’Histoire des Voyages », du « Journal Pour Tous » ou du « Mercure français », grandes images maculées où l’on voit des dieux, des saintes, des rois et des guerriers. Parfois un moineau indiscret se pose sur le sein de Diane ou sur la croupe d’Aréthuse. Et parfois une feuille morte tombe en tournoyant d’un arbre pour saurer un instant le front d'un poète à jamais oublié......