Extrait du journal

La France entre dans une période d’imitation allemande. Exact pour la littérature, où beaucoup peinent à penser et à écrire à l’allemande qui feraient mieux de penser et d’écrire bonnement à la française, cela est surtout exact pour l’instruction publique à ses trois degrés, instruction primaire, instruction secondaire, instruction supérieure, où les méthodes allemandes, les livres allemands, les professeurs allemands, les élèves allemands sont pris pour modèles, copiés, enviés, admirés, sans réserves, sans choix, sans examen. Nous n’attaquons ni les méthodes allemandes, ni les livres allemands, ni les professeurs allemands, ni les élèves allemands; nous accordons qu’ils sont parfaits, qu’il est impossible d’imaginer un régime pédagogique plus excellemment coordonné, mieux conçu dans toutes ses parties pour produire les résultats qu’il plaît à l’Allemagne de lui faire produire. Mais nous ne sommes pas très convaincus que ces résultats soient tels que de faire rêver un peuple de haute culture et de haute littérature. Nous craignons qu'ils ne nous paraissent si enviables que pour ne les avoir pas examinés d’assez près. Nous croyons qu’on peut souhaiter mieux pour son pays, qu’il y a des fruits plus fins et plus savoureux, et que ce n’est vraiment pas la peine de violenter le génie national pour lui faire produire des pommes au lieu de pêches. Sans discuter les raisons pour lesquelles l’Allemagne a renoncé spontanément à des choses auxquelles nous sommes restés attachés, nous voudrions constater la direction générale qu’elle imprime à l’éducation nationale et dégager la pensée qui préside actuellement au développement du grand peuple germanique....