Extrait du journal

Les pythonisses ont prévu une année fié vreuse, agitée, pathétique. Mais pas une, en revanche, n'a vu dans le marc ou dans les tarots que l'année serait, tout d'abord, glaciale. La double vue gêne pour voir de près. Les rares amis qu'on ose arrêter dans leur course frileuse risquent un nez rougi au ras du col levé, placent dans votre main une paume gelée et murmurent contre « un pareil hiver, qu'on n'avait pas vu depuis bien longtemps ». On l'avait d'ailleurs vu en 1930. Mais où sont les bises d'antan ? N'empêche que cette vague de froid qui dé ferlé, rageuse, des dunes du Nord aux coteaux de Provence, nous semble à tous bien imper tinente ! Depuis la guerre, il n'y avait plus de saisons. C'était un fait. On grelottait en juin et l'on flânait, en taille, sous l'œil du vieux décembre.' Sans crier gare, le^ thermomètre a repris ses valeurs. Et le voilà qui joue à la baisse. Il a, hier, descendu huit degrés sous son hon nête barre rouge. Il n'y a, hélas ! que les fourreurs qui gagnent. Déjà le Bois revoit les patineurs rôder au tour des Lacs, épiant les glaçons qui construi sent leur puzzle. A Versailles, les gardes s'échelonnent tout au long du canal défendu. Une arabesque s'inscrit, par miracle, sur le petit carré d'une contravention. ...Alors, à la manière de Gribouille, les Pa risiens emmaillottent leurs skis, fourbissent leurs piolets, retendent leurs raquettes et, pour fuir la glace, s'en vont chercher les neiges éternelles. Georges Ravon....