Extrait du journal

Le bon Dieu, lorsqu'il eut créé la Terre, crut devoir se donner un jour de repos, qui était le dimanche. Les critiques, eux, n'ont pas créé la Terre, mais ils viennent de la voir jouer au théâtre Antoine, et cependant il leûr est impossible de se reposer. Le PalaisRoyal, ayant à représenter une pièce nou velle, n'avait rien trouvé de mieux que d'en fixer la répétition générale à demain dimanche. Et dans l'après-midi encore ! Evidemment, le directeur s'était dit que les critiques ne doivent pas avoir de famille. Ce sont des journalistes, par conséquent des gens sans feu ni lieu. Que pourraient-ils bien faire de leur dimanche ? L'idée ne leur viendrait certainement pas d'aller à l'église. C'est une réputation bien établie que les journalistes ne vont à l'église que le jour de leur enter rement. Ils iraient donc au café ; ils pas seraient leur après-midi à boire des bocks et à jouer aux cartes. Et le directeur du Palais-Royal, avec une sollicitude vraiment touchante, avait songé à leur ouvrir ce jour-là les portes de son théâ tre. De la sorte on n'en aurait ramassé auaucun dans la rue. Ce sentiment était loua ble, ce n'est pas douteux. Mais pourtant, même parmi, les critiques, il en est qui ont d'autres foyers que ceux des théâtres. Les jour nalistes sont maintenant presque aussi rangés que- des comédiens. On en voit qui sont mariés, pères de famille et qui ne sont pas fâchés, après le labeur de la semaine, de passer chez eux leur dimanche. L'aimable, directeur du Palais-Royal a bien voulu finalement leur accorder cette grâce. C'est très heureux. Que M. Chariot s'amuse, rien de mieux, mais il aurait eu tort de vouloir le faire aux dépens du prochain. — E....