Extrait du journal
-I- re une tangente à l’actualité. vieux polisson a coupé les oreilles gamin pour s’amuser; j'ai entendu \ t d’une vieille polissonne de tille qui - s fait à sa virginité ridée en éreintant s n petit neveu. Voici, d’ailleurs, la lettre de mon cor- pondant : On fait bruit, madame, autour d’un scandale parisien qui a eu pour action un prétendu docteur et un gosse pré coce ; nous avons, rue des Ratignolles, une vieille femme absolument digne d’être le pendant de cet amateur d’oreil les coupées. Elle tient sous ses tentacules un de ses .petits neveux et le martyrise pour sa plus grande joie. L’autre semaine, des voisines inquiètes de la mine du jeune homme, ont même été infor« mer le commissaire de police, lequel, « après enquête, aurait déclaré que l’af« faire ne le regardait pas. « La demoiselle a bien cinquante ans; « son neveu a dix-huit ans à-peine. Elle « est laide ; il est presque joli garçon. De« puis trois ans ils vivent ensemble. Cha« que nuit, il paraît qu’elle va dans sa « chambre, armée d'une cravache, et là, « elle roue de coups sa victime, jusqu’à ce « que, prête pour savourer le plaisir que « son hystérie réclame, elle prenne dans « ses bras le corps meurtri de l’adolescent, « l'aime et s’en fait aimer. « Le neveu de la demoiselle en ques« tion est, dit-on, devenu légèrement idiot; et, au contact de sa tante, il au« rai t hérité de son hystérie et de son vice. « Les traitements d’amour qu’il subit ne lui déplaisent plus ; au contraire, il les recherche et se prête complaisam ment à la cravache qui le cingle... » J’ai pour voisin de plage, une célébrité médicale des hôpitaux de Paris, et tantôt, assis,à marée basse, sur le sable, je lui ai demandé ce qu’il pensait de ces cas de folie. — Ma chère amie, m’a-t il dit, tout ça <■ l ’est la faute à Georges Oh net et aux " feuilletonnistes de son espèce. Ces mes<• sieurs excitent les imaginations roma nesques, produisent des jouissances " d’esprit, font espérer que la vie sera «■ pareille à leurs exemples idiots, et, « quand vient l’âge, les lecteurs de leurs romans sont assez abrutis, par la mas« turbation cérébrale subie, pour recher« cher lo plaisir dans la férocité. « — Gomment, m’écriai-je, c’est la faute « à Georges Ohnet ? « — J’en suis persuadé, poursuivit-il. <' La lecture quotidienne de ces livres pro« duit, dans l’esprit des femmes surtout, « un elfet désastreux. On ne leur parle <« pas d’amour physique ; on le leur fait " seulement soupçonner. Jamais on ne " leur décrit les caresses réelles de la pas« sion, jamais on ne leur trace les grandes " lignes d’un tableau d’amour où deux « êtres, abandonnés l’un à l’autre, se pro
À propos
Fondé fin 1890 par François Mainguy et René Émery, Le Fin de siècle était un journal mondain bihebdomadaire. Lorsqu’il paraît, il sort immédiatement de la masse en vertu de son style badin et de l’érotisme à peine voilé de ses dessins. En 1893, son « bal Fin de siècle » fait scandale à cause de la tenue très légère de certaines de ses convives. Quelques années plus tard, en 1909, le journal devient Le Nouveau Siècle. Il disparaît en 1910.
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