Extrait du journal

La Lettre de M. Henri Martin AU SIÈCLE M. Henri Martin a adressé avant-hier à M. Louis Jourdan, du Siècle, une let tre importante; car un fait affirmé par un témoin tel que lui devient un fait acquis à l’histoire. Cette lettre a besoin d’être développée, complétée, et j’espère que M. Henri Martin voudra bien le faire, avec sa loyauté accoutumée. Cela est nécessaire pour que le 31 octobre soit bien expliqué, et surtout pour qu’il ne recommence pas dans quelques jours. M. Greppo a ditque, le 31 octobre, les maires de Paris ont voté à l’unanimité l’élection de la Commune. M. Henri Martin atteste qu’ils ont voté l’urgence des élections municipales, sans employer le mot de Commune. Or, en ordonnant ces élections, le Gouvernément a déclaré qu’elles étaient le contraire de la Commune. Il importe donc de préciser, au moment où les nou velles mairies vont entrer en fonc tions. Par Commune, les journaux révolu tionnaires entendent un maire central et un conseil central, élus par les ci toyens. Par élections municipales, le Gouverne ment a entendu des maires locaux, n’e xerçant que des fonctions locales, dans chacun des vingt arrondissements sé parés. Il n’y aurait pas, quant à présent, de conseil municipal central, s’assemblant à l’Hôtel de Ville où siège le Gouverne ment, et cela se comprend. En effet, s’il y avait un maire central et un conseil central, occupés de taxer, de défendre et d’alimenter Paris, à côté d’un gouvernement, enfermé dans Pa ris, nommé par Paris, qui n’a précisément d’autre besogne que de taxer, défendre et alimenter Paris, ce serait un corps à deux tètes. Il y aurait un duel inévitable entre le Gouvernement et la Commune, duel où l’un des deux serait tué. C’est ce qui a failli arriver le 31 octobre. C’est ce que veut le parti Blanqui. C’est ce que cinq cent mille voix contre cinquante mille ont déclaré, jeudi dernier, ne pas vouloir. Qu’est-ce que les maires provisoires ont demandé le 31 octobre ? Est-ce un maire cent) al et un conseil central ? Cela serait la Commune, qu’ils aient ou non prononcé . le nom. Est-ce un pouvoir électif local par arrondissement ? Cela est fait. Mais, ainsi élus, les maires sont des agents d’exécution, ils ne sont pas des agents de contrôle. La ville est décen tralisée, elle n’est plus centralisée. Cha que maire n’est rien, absolument rien, en dehors de son arrondissement. Le gouverneur de Paris, président du Gouvernement de la défense nationale, le ministre de l’intérieur, le délégué pour l’administration de Paris, le préfet de police, voilà les autorités centrales. Ces autorités peuvent consulter les maires, mais les maires n’ont plus le droit de se réunir, de délibérer en com mun, de reformer une ombre de Con seil municipal irrégulier, illégal, sans mandat, autour de M. Etienne Ara go, dont les fonctions provisoires n’ont plus de sens et ne devraient plus être main tenues. • Si tout cela n’est pas bien entendu, la Commune peut renaître demain, pendant les épreuves du siège. Nul n’a plus d’autorité que M. Henri Martin pour écrire dans l’histoire d’hier ce que les maires provisoires ont exac tement demandé le 31 octobre, et sur tout pour préciser, dans l’intérêt de la politique de demain, quel doit être le rôle des maires définitifs, parmi les quels tout Paris a» été heureux de le voir élu. Il trouvera tout naturel, je n’en doute pas, de donner publique ment des explications sur sa lettre, Les maires ont-ils proposé, le 31 octobre, l’élection d’un pouvoir central ? Vont-ils se renfermer désormais dans leurs at tributions purement locales ? Voilà les deux questions sur lesquelles l’opinion publique a besoin d’être éclairée sans retard. Augustin Cochin....