Extrait du journal

Roll avait un nom bref et sonore de conquérant et il en fut un par la puissance de son art et par le charme de son abord. Ce charme grandissait au cours des années, même avec la blancheur luxuriante de la barbe et des cheveux et il devenait cette séduction de l'homme de soixante ans qui, avec l'expérience du sourire, possède une influence que ne connaissent point les jeunes, insinuante et féline chez un Pozzi, chez lui léonine et imposante.. Maintenant il est couché sous le velours funèbre, dans cet immense ateIi8i* qu'emplissait de vie sa présence. Il était si triste et si 'gui, si humain l'esprit toujours en éveil, avec une boutade qui jaillissait derrière son sourire retenu la main franche, la parole caressante Il jouait supérieurement -le l'ironie, ainsi qu'il jouait do l'épée ou du fleuret et il maniait la satire, écrite ou parlée, avec une âpreté d'honnête homme car il écrivait délicieusement, et .il laisse quelques deux ou trois cents pages qui seront précieuses é découvrir. On lisait dans la clarté de ses yeux bleus sa haine du mensonge, son mépris du cabotinage et son dédain de l'argent. Mais ses yeux sont fermés; et nous nous apercevons que nous ne savons rien dire avec des mots' de ceux que nous Nous allons le confier dans quelques heures à la Ville des morts. Mais nous sentons bien qu'il n'y disparaît point tout à fait. N'est-il pas probable, au demeurant, que d'une manière et par ders voies qui ne s'imaginent pas, les morts revivent et nous entourent? Et pour nous, faute de mieux comprendre, le souvenir demeure, le souvenir d'une noblesse et d'une beauté qu'avec sa faulx n'emporte point la Camarade....