Extrait du journal

Aucune ville n'est moins éclairée que Pékin. En dessous, les légations, étouffées par leurs jardins, finissent à ces poteries moyenâgeuses qui s'avancent jusqu'au vide du glacis, de la zone de tir. A gauche, le Hatamen et les plus grandes artères chinoises .ne s'inscrivent dans .ce plan nocturne que par des raies dont on peut douter, tant elles sont pâles, comme d'autres voies lactées non sinueuses. La ville tartare, elle, n'est éclairée que par les vessies de porc des cours intérieures, tamisées encore par les joncs tressés et les arbres, si nombreux qu'on ne sait si Pékin est une ville ornée ou une forêt décimée. Enfin, sauf l'éclairage électrique du Pei-Hai, pagode illuminée depuis trois semaines seulement, la Ville Interdite ne se révèle que par son absence : le souvenir du jour, seul, y allume les toits de tuiles d'un jaune impérial, moisson de maïs, aux angles cornus comme les tentes des fils de Gengis-Khan dont on aurait relevé les bords à l'aide de ces cordes de soie qui, d'après Marco Polo, fixaient le ciel au sol....