Extrait du journal

Ne nous y résignons pas Il ne naît pas assez d'enfants en ^France, mais ce qui est plus grave, c'est qu'il en meurt trop. Il en 'meurt trop par ignorance, par incurie, par maladresse, par cruauté, par vengeance et par égoïsme. Par égoïsme, parce que Jes parents qui se suicident ne veulent pas laisser ^leur enfant tout seul sur la terre. Alors ils l'emportent. Ils lui donnent cette horrible et funèbre preuve de tendresse la mort. Cependant. s'ils avaient réfléchi, ils auraient compris que lorsque l'on a un enfant, non seulement on n'a pas le droit de le tuer, mais on n'a pas non plus le droit de se tuer soi.même. Parce que tant que l'enfant est là, vivant, bien portant et ri,elle de tout son avenir inconnu, il ;n'y a pas de véritable tragédie pour -les parents. La seule tragédie pou«les parents, c'est de perdre leur enfant. Il y a aussi les enfants quil meurent parce qu'on en fait des instruments de vengeance, ou qu'on les utilise comme accessoires dans les querelles conjugales. Quotidien*nement, des enfants sont jetés par la fenêtre, précipités dans des cages d'escalier, dans des puits, dans des rivières, pour punir celui-ci dé sa jalousie, ou celle-là de ses infidélités. Il y a les enfants qui disparaissent par cruauté, la lamentable cohorte des enfants martyrs. .Les enfants martyrs sont légion. C'est que leurs bourreaux bénéficient inexplicablement des indulgences de la loi. Une amende dérisoire et des peines de prison relativement courtes n2" constituent pas de telles riwguè&rs, que les monstres s'en puissent inquiéter. Et d'ailleurs, que reste-t-il de l'enfant quand les voisins, terrorisés, préviennent la police ? Rien, presque rien, beaucoup de plaies sur une indicible maigreur, la légèreté pathétique d'un oiseau tombé, en hiver, de son nid. Même si l'on guérit ce corps, l'âme reste marquée. Il faudrait une somme d'amour égale à la somme des douleurs subies pour guérir intégralement un enfant martyr. La société n'a pas le temps de se pencher sur un malheur si personnel. Elle a joué déjà un grand -rôle, «n irrter»venant. On ne peut pas lui demander davantage....