Extrait du journal
Le Parti Socialiste a fait son devoir par Léon BLUM HIER, Pierre Brossoîette achevait son bel article par quelques phrases que je me permets de reproduire. Après avoir indiqué pourquoi la conclusion de l’accord avec Moscou lui paraissait désormais certaine après en avoir fait res sortir la signification et l’importance décisive, il concluait ainsi : « L’opinion sera reconnaissante aux gouvernements qui achèvent actuellement de s’entendre après s’être si longtemps fuis. Elle sera reconnaissante au gouvernement français dont l’entremise a été si utile au terme de ces laborieux pourparlers... (c’est moi qui souligne les deux mots « au terme » et j’aurai quelque jour l’occasion de dire pourquoi ). Mais ce n est sans doute pas trop présumer que d escomp ter aussi sa gratitude pour les hommes qui, insensibles à la haine et à I outrage, dès avant Munich et au lendemain même de Munich, bien avant M. Daladier et M. Chamberlain et pendant longtemps contre eux, ont infatigablement prêché la constitution du bloc pacifique qui s'achève aujourd’hui et recommandé à la France le rôle d’intermé^ aire quelle vient de jouer si efficacement entre Londres et Moscou. » Pourquoi, en effet, ne revendiquerions-nous pas avec quelque fierté l’hommage qui est dû à notre Parti, au journal de notre Parti, au premier gouvernement de Front Populaire à direction socialiste ? Depuis de longs mois, le Populaire a dénoncé la politique de l’iso lement, la politique du « repli impérial », la politique des « mains li bres » laissées au Reich hitlérien dans le Centre et l’Est de l'Europe en contre-partie d’une illusoire sécurité. Depuis des mois, il s’est efforcé de persuader les masses populaires que la sécurité de la France comme la paix de l’Europe dépendaient réellement du groupement intime et de la solidarité active de tous les peuples résolus à défendre leur li berté contre l’agression. Depuis des mois, il s’est appliqué à montrer qu'un système solide de garanties et d’obligations défensives devait nécessairement englober la Russie soviétique, que l’une des conditions substantielles de la paix européenne résidait ainsi dans le rapproche ment de la Grande-Bretagne et de la Russie soviétique, et qu’il appar tenait à la France, alliée de l’une et de l’autre, de procurer ce rappro chement. - - **• * ' Toute l’action extérieure du gouvernement de Front Populaire à direction socialiste s’était déjà fondée sur ces mêmes principes : recherche du règlement d’ensemble des problèmes européens, rappro chement et resserrement des peuples pacifiques, effort pour ranimer la sécurité collective dans toute la mesure où le permettait l’état de I Europe. Les plus récentes résolutions du Parti, celle de Royan comme celle de Montrouge, s’en sont inspirées, elles aussi. Le Parti, d’ailleurs, en les adoptant, ne changeait rien, n’innovait rien. Il restait fidèle aux conceptions qui ont toujours été les siennes, comme celles de l’Internationale. Il se bornait à les ajuster à la condition nouvelle de l'Europe, telle qu’elle résulte de l’existence, du progrès, des desseins conquérants du fascisme international. Mais en les maintenant malgré le trouble qu’une crise comme celle de septembre dernier avait jeté dans les esprits et dans les cœurs, il a accompli un grand acte. Il a donné le signal, tracé la voie à la masse de l’opinion publique, comme au Parlement, comme au gouvernement lui-même. Nous pouvons le rappeler aujourd’hui sans commettre, comme disait Jaurès, le péché d'orgueil. Nous pouvons et devons rappeler également que si, du côté an glais, la constitution du bloc pacifique et la conclusion de l’accord avec les Soviets sont l’œuvre effective de M. Neville Chamberlain et de lord Halifax, ces deux hommes d'Etat ont été, eux aussi, éclairés, guidés, poussés par des précurseurs. Dans le revirement de la GrandeBretagne officielle, une part décisive revient à la campagne magnificue de nos amis du Labour Party, et aussi à l’entrée en ligne de quel ques personnalités puissantes telles que M. Anthony Eden et M. \Vinston Churchill. Si nous marquons ainsi notre fierté et notre joie, c’est que notre succès est celui de la Paix. Je m'entretenais hier matin avec un des hommes qui connaissent le mieux et du plus près la situation de l’Allemagne nazie. Je ne veux pas le nommer; on me croira sur parole. Il me disait : < Si I entente entre Londres et Moscou avait échoué, ou avait traîné plus longtemps, l’attaque de vive force contre Dantzig était certaine. Aujourd'hui, je n’oserais pas jurer qu’elle ne se produira plus, mais je la crois évita ble. » Tant il est vrai que la chance de la paix consiste dans la convic tion inspirée ou imposée aux dictateurs que l’agression comporte dé sormais pour eux un risque, d'abord, un danger ensuite. C est ainsi que l’on peut arrêter la guerre. C’est ainsi qu'on peut aborder l’orga nisation stable de la paix. Tout ce qui étend et fortifie le rassemble ment des puissances pacifiques, rapproche et facilite en même temps les appels et les offres. Des gestes dangereux pour la paix, tant qu’ils demeuraient équivoques, tant qu’ils pouvaient être rapportés à la faiblesse et à la peur, tant qu’ils risquaient d'encourager les dicta teurs à de nouveaux coups de force et à de nouveaux
À propos
Lancé en 1908 sous le patronnage d'A. Bedouce, député SFIO, Le Midi socialiste était un quotidien de gauche édité à Toulouse. En 1910, Vincent Auriol en devient le rédacteur en chef. Malgré ses vélléités de grand quotidien régional, Le Midi socialiste se vendait essentiellement dans Toulouse même, où son tirage était par ailleurs relativement faible.
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