Extrait du journal
Chambre des Députés Extrait de la séance de mercredi M. Brisson prend place au fauteuil de la présidence à trois heures précises. Le président fait connaître qu’il a reçu de M. le président de la République la lettre suivante, dont il donne connais sance à la Chambre : La lettre de M. Casimir-Périer Messieurs les sénateurs, Messieurs les députés, Je ne me suis jamais dissimulé les difficultés de la tâche que l’Assemblée nationale m’a imposée. Je les avais prévues. Si on ne refuse pas un poste au moment du danger, on ne conserve une dignité qu’avec la conviction de servir son pays. La présidence de la République, dépourvue de moyens d’action et de contrôle, ne peut puiser que dans la confiance de la nation la force morale sans laquelle elle n’est rien. Ce n’est ni du bon sens, ni de la justice de la France que je doute ; mais on a réussi à égarer l’opinion publique ; plus de vingt années de luttes pour la même cause, plus de vingt années d’attachement à la République, de dé vouement à la démocratie, n’ont suffi ni à con vaincre tous les républicains de la sincérité et de l’ardeur de ma foi politique, ni à désabuser des adversaires qui croient ou affectent de croire que je me ferai l’instrument de leurs passions et de leurs espérances. Depuis six mois se poursuit une campagne de diffamation et d'injures contre l’armée, la magistrature, le Parlement, le chef irrespon sable de l’Etat, et cette liberté de souffler les haines sociales continue à être appelée la liberté de penser. Le respect et l’ambition que j’ai pour mon pays ne me permettent pas d’admettre qu’on puisse insulter, chaque jour, les meilleurs serviteurs de la patrie et celui qui la représente aux yeux de l’étranger. Je ne me résigne pas à comparer le poids des responsabilités morales qui [lèsent sur moi et l’impuissance à laquelle je suis condamné. Peut-être me comprendra-t-on si j’affirme que les fictions constitutionnelles ne peuvent taire les exigences de la conscience politique ; peutêtre, en me démettant de mes fonctions, auraije tracé leur devoir à ceux qui ont le souci de la dignité du pouvoir et du bon renom de la France dans le monde. Invariablement fidèle à moi-même, je de meure convaincu que les réformes ne se feront qu’avec le concours actif d’un gouvernement résolu à assurer le respect des lois, à se faire obéir de ses subordonnés et à les grouper tous dans une action commune pour une œuvre commune. J’ai foi, malgré les tristesses de l’heure pré sente, dans un avenir de progrès et de justice sociale. Je dépose sur le bureau du Sénat et de la Chambre des députés ma démission des fonc' tions de président de la République française. CASIMIR-PÉRIER. Cette lecture est fort peu interrompue. Un silence absolu en accueille la fin. Au Sénat La séance est ouverte à trois heures, sous la présidence de M. ChallemelLacour. Les sénateurs sont très nombreux. Au banc des ministres, on remarque le général Mercier, MM. Guérin et Félix Faure. M. Challemel-Lacour donne lecture de la lettre de démission. De fréquents murmures accueillent cette lecture à l’extrême-gauche de la salle. M. Floquet s’écrie : Nous avons subi de bien autres outrages ! Un autre membre dit : C’est une dé sertion ! M. Challemel-Lacour avise le Sénat que l’Assemblée nationale se réunira de main jeudi, à une heure. La séance est levée au milieu d’une très grande agitation....
À propos
Fondé en 1831, Le Nouvelliste de Bellac était un journal de la Haute-Vienne. Il disparaîtra plus de cent ans plus tard, en 1942.
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