Extrait du journal

— On m’avait affirmé votre mort... On vous disait tué sur les champs de bataille allemands... bégaya la comtoise, qui lançait des regards anxieux sur son interlocuteur, car elle doutait encore de son identité. — Ah ! ah ! ricana-t-il ; c’est commode, en ef fet, d’accepter le premier bruit répété par les échos du hasard !... On y trouve l’excuse d’une existence souillée par le crime et l’adultère. — Monsieur! — Appelez-moi donc capitaine de Thurige, je vous prie, madame ; cela nous aidera à faire un retour vers le passé... à moins que le remords n’ait élevé entre vous et ce passé une barrière infranchissable — Où voulez-vous en venir, monsieur? — A vous demander compte de votre con duite, depuis le jour où vous avez providentiel lement échappé aux poignards que j’avais apostés sur votre passage... — C’était dope vous... dans la forêt d’Amboise?... — Oui, madame, je punissais ainsi le dé shonneur qui avait envahi ma maison. — Vous fûtes cruel !... — C'était mon droit; car, pour prix des joies ineffables que j’avais apportées au foyer conju gal, n’avez-vous pas traîné mon nom dans la fange ? Et cependant, je vous aimais bien, allez!, vous pure, jeune fille que j’avais reçue en récom pense de loyaux services rendus à ma patrie !... Pour prix de mon amour et de mon dévouement, lâche créature, n'avez-vous pas introduit la honte sous les blancs rideaux de l’hyménée!... Voilà pourquoi je donnai alors l’ordre de vous tuer !... — Emmanuel, cette vengeance ne vous suffitelle donc pas ? -- Vous croyant morte, et n’ayant plus d’in jures à venger, je me retirai dans la solitude, où piop coeur savoura la coupe amère des désillu...