Extrait du journal
Je me souviendrai toujours du chagrin que fit à M. de Metz, l’illustre fondateur de la colonie de Mettray, une critique de ce genre. Il avait créé sa colonie pour y re cueillir les enfants qui avaient été condam nés en justice. 11 les élevait et les ramenait au bien. M. de Metz était originaire de Dourdan, mon pays natal. Il y possédait une vaste propriété, en sorte qu’il y était connu de tout le monde. Un malheureux ouvrier, père de six ou sept enfants, le supplia de prendre un de ses enfants à Mettray ; il alléguait sa probité, son amour du travail, le désir qu’il avait de voir l’enfant, qu’on était obligé d’abandonner à la rue, rece voir une meilleure éducation. M. de Metz fut inflexible. Les statuts de la maison portaient qu’on n’y admettrait que les enfants condamnés en justice. — Il faudra donc que mon fils vole, lui dit tristement le père, pour mériter d’étre élevé par vous! J’ai plus de dix fois, dans mon enfance, entendu conter cette anecdote à M. de Metz, qui n’avait jamais pu digérer le reproche. Il y avait pourtant du vrai dans la plainte du pauvre homme. L’autre jour au conseil municipal de Paris, un de ces messieurs s'est élevé avec force contre le régime de nos prisons, qu’il trouvait trop complaisant et trop doux. Ses doléances sont restées sans écho. Elles venaient se heurter contre un préjugé trop fort. Le vent est depuis un demi-siècle et davantage à la philanthropie. Nous nous laissons conduire, d’autres diraient : nous nous laissons égarer à une sentimentalité fausse. Mais que nous ayons raison ou tort, aucun raisonnement ne prévaudra contre cet état d’esprit. Toutes les consciences se révolteraient, s’il était question de ne don ner aux prisonniers qu’une botte de paille pour dormir, du pain noir pour manger et de l’eau pure pour boire. C’est pourtant le régime dont se contentent beaucoup de paysans, qui n’ont jamais fait que rendre service à la société. Mais je serais assez de l’avis qu’avait M. Ginisty. Il y a dans notre civilisation des labeurs si vils, si répugnants et si dangereux, que les travailleurs de bonne volonté man quent pour ces besognes. Pourquoi la so ciété ne contraindrait-elle point ceux qui ont démérité d’elle à les faire en expiation ? Et tandis que je lisais les propositions de M. Ginisty, je songeais à ces défrichements de la terre d’Afrique, qui ont coûté la vie à tant d’héroïques religieux. N’eût-il pas mieux valu employer à quelques-uns de ces travaux ces gens dont la vie n’est qu’une charge pour tout le monde? Il y a des marais à assainir, des routes à ouvrir, des forêts à abattre ; on a des bras, on les laisse oisifs ou on les occupe à fabriquer, au rabais, des chaussons de lisière, pour le plus grand profit des industriels qui les vendent 1 C’est une organisation déplorable. FRANCISQUE SA RC E Y....
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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