Extrait du journal

L’homme des villes aura tou jours besoin de l'homme des champs ; l’homme des champs a besoin de l’homme des villes. Pourquoi faut-il que leur accord soit si souvent troublé ? A cette heure les diffuseurs de propagande malsaine, sous le prétexte des difficultés de l’ali mentation générale, aggraveraient volontiers les causes de mésen tente entre ruraux et urbains, si l’on prêtait l’oreille à leurs mé chants propos. Ils transposent à notre usage les vers du fabuliste et mettent dans la bouche de l’agriculteur cette invitation rustique: « De main vous viendrez chez moi. Ce n’est pas que je me pique de tous vos festins de roi, mais rien ne vient m’interrompre, je mange tout à loisir. » C’est une double légende qu’il ne faut pas laisser se répandre. Les festins du citadin ne furent jamais de roi et l’homme des champs actuel n’a pas à loisir de quoi faire la nique aux ventres affamés. Nous participons tous au banquet des privations. Sans doute le producteur de légumes paraît être mieux pour vu et sa basse-cour excite notre envie, sous l’aspect de l'autarcie agricole. Mais de quoi vivrait-il, comment paierait-il ses impôts et sui'porterait-il ses charges s’il ne tâchait de faire argent des fruits de son travail ? Quant aux volailles et aux la pins que l’on imagine en abon dance chez lui, il en est de cela comme du poisson dont on croit que les pêcheurs regorgent parce que leur métier est de le sortir de l’eau. Les difficultés maté rielles de l’élevage égalent à la ferme les difficultés des pécheurs à la mer. Ne croyons donc pas aussi niai...