Extrait du journal
ment perdu la tète pour se lancer dans une telle voie 11 Condamner le jeu ! ma» il faut, pour cela; être atteint de folie furieuse. Quel charme aurait donc Fcxistenee humaine, si le jeu en était banni. Le mon de ressemblerait à un vaste couvent de trappistes et chaque homme aurait une figure de croque-mort. Eu vérité , je serais bien curieux de savoir en quoi le jeu peut mériter les anathèmes fulminés contre lui par les Prudhommes grincheux et pudibonds. Je ne vois, au contraire, quant à moi, rien de plus naturel, de plus humanitaire, de plus civilisateur même, que le jeu. Non seulement je dis cela à haute voix , mais encore je le prouve. Le jeu est naturel, parce que tout le monde joue, a joué et jouera , depuis l’enfant au maillot jusqu'au vieillard enfoncé dans son fauteuil. Le jeu est humanitaire et civilisateur, car il crée d’agréables relations entre des hommes qui, sans lui, sans les distractions qu’il procure, emploieraient peutêtre leur temps à se déchirer, à se mordre mutuelle ment. Le jeu tue l’ennui et otnpêche les médisances et les calomnies. Le jeu, enfin, est un moyen de for tune, qui, du jour au lendemain, par un simple coup de sort, par un caprice du hasard , fait d‘un pauvre diable sans le sou un homme riche et heureux.» En entendant cette dernière phrase de celte étrange apologie, je n’eus plus le courage de garder le silence, et interrompant tout-à-couple singulier apologiste, je lui dis : —Gagnez-vous donc souvent ? — Tous les jours, Monsieur, me répondit le quidam. Je me fais, avec les cartes , par le doux maniement de l’as de pique et de la dame de cœur, dix francs de rente par jour, tout en m’amusant du matin au soir. — Et, sans doute, repris-jc, vous vous croyez très certainement un honnête homme ? — Parbleu 1 qui donc en douterait ? — Mais... peut-être vos partenaires , ceux-là mê mes aux dépens desquels vous empochez vos dix fr. par jour, tout en vous amusant du matin au soir. — De quel droit se plaindraient-ils ? Ne courentils pas, comme moi, ta chance de gagner ? — Oui ; mais si en courant celte chance, ils exposent leurs familles , leurs femmes et leurs enfants à man quer du nécessaire, à mourir de faim, à se déshonorer, ne vous croyez-vous pas, vous, gagnant, quelque peu coupable et responsable du ces malheurs. — Ah ! Monsieur, me répliqua mon interlocuteur,...
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
En savoir plus Données de classification - daniel manin
- minus
- ma
- cert
- marseille
- paris
- ain
- venise
- canal
- kappa