Extrait du journal

Nee députés — sacré tonnerre ! — Parlons comme eux. Possèdent un dictionnaire Déjà lameux. On voit, au cours d’une harangua, — C’est fait exprès — Ce qu’au Palais-Bourbon la langue Fait de progrès 1 Moi je rêve — doux rêve en somme — Le jour où l’on Parlerait à la Chambre comme Dans un salon. Imaginez-vous — chaque membre S’étudiant — Qu’on ne se regarde à la Chambre Qu’en souriant I Ça changerait nos honorables : Tu — juste ciel 1 — N’aurais que des mots adorables. Officiel ! Au lieu d’injures éternelles, — Traîtres, forbans ! — Rien que des douceurs fraternelles Sur tous les bancs I Tout en discutant un article Prêt à passer, On descendrait dans l’hémicycle Pour s’embrasser I Ces messieurs, au lieu de se mordre, —- Rouges ou blancs — Se feraient rappeler a l’ordre Pour leurs élans 1 Bourgeois pourrait lâcher sa cloche Aux bruits usés: On n’entendrait, à droite, à gauche, Que des baisers I Nos députés— douces époques — Loin de bondir, N’oseraient leurs mains réciproques Qu’à s'applaudir! Ils auraient des voix de fauvette Dans les bureaux... Et ne prendraient à la buvette Que des sirops. Conduite que l'amour suggère ; En partant, tous S’en iraient bras-dessus, ma chère* Et bras-dessous I L’écho dirait : — Quelle gageure 1 Quoi I l’on n’entend Plus à la Chambre aucune injure : C’est épatant 1 Que de doux mots on se fredonne, Nul n’est hué... Je n’y suis pas— qu’on me pardonne Habitué I » Et la Chambre de bonté pleine — Vienne ce jour — Ferait, au lieu de lois de haine, Des lois d’amour I...