Extrait du journal

sur la Belgique ANVERS SANS BATEAUX J'entrai à la Commanderie. Un vrai Flamand, fils de la brume et de la pipe en terre, m'attendait. Teint rose, un bon parler, bien gras et rond, ce caractère de lent mangeur qui réfléchit à ce qu'il mange qu'ont les hommes de ce pays-là. C'était M. te commandant du port, comptable d'un fret immense, qui jongle avec les millions de tonnes, range soigneusement les bateaux le long des quais, calcule le nombre de wagons que l'Europe lui envoie, mesure la portée des grues et règle le débit des suceurs de céréales. M. le commandant est un personnage important. Les remorqueurs le saluent à petits coups de sifflet quand il passe et les hommes qui travaillent dans la poussière des cales lèvent les yeux vers lui et touchent leur bonnet. Il est, en chair et en os. la personnification d'un des plus grands ports du monde. Un marin ? Oui, car il connaît les vents, les marées, les compas et les gens de tous les pays, bien qu'il n'ait pas navigué, je crois, depuis sa jeunesse. fl y a une trentaine d'années qu'il est assis dans le fauteuil où je le vois, et il a laissé les océans, les races, les pavillons. l'écho des tempêtes venir à lui et se transformer sous ses yeux en solides colonnes de chiffres....