Extrait du journal
Seule auprès du feu qui s’éteint dans la coquette cheminée et pressant d’une main tremblante un livre qu’elle ne lit pas. Lise d’Harmer lève les yeux au ciel dans une ardente et muette prière, frissonne au moin dre bruit, regarde anxieusement la porte, étouffe un soupir et reprend son attitude désolée. Tout à coup les tentures s’écartent et, brus quement, un homme aux formes athlétiques entre, se cambre et dit : — Vous le voyez, madame, je suis vivant et c’est votre amant qui est mort. Je viens de le tuer d’un coup d épée. Le duel a parfois du bon. En tombent votre cher Fabrice a murmuré un nom de femme qui n’était pas le vôtre, il paraît qu’il ne vous aimait déjà plus. Puis faisant quelques pas vers sa femme impassible, d Harmer continue : — A nous deux maintenant ! Je pourrais vous chasser comme une drôlesse et crier par tout votre infamie que je suis seul à con naître. Eh bien, non ! J'ai imaginé un châ timent plus original, le voici : Dès aujourd hui, « vous m’aimerez ». — Moi, vous aimer ! mais tuez-moi donc, tuez-moi tout de suite... — Du calme, s’il vous plaît. Entendonsnous : Vous m aimerez devant le monde, rien de plus. J entends que vous simuliez pour moi une vive passion et je répondrai à votre amour par l’expression touchante d’une ten dresse exemplaire. Au lieu d'être ridicule, je veux être envié. Quand nous serons seuls, au décor : pas une plainte, pas un mot, pas un regard, si bien que, sous le même toit, nous vivrons séparés comme si nous étions, vous à Ma dagascar et moi au Grcnland. Après une pause : — Acceptez-vous ? Sinon je vous chasse et je divulgue vos ignominies. Votre pèie vous maudit, votre mère vous renie, vos sœurs vous fuient, vos parents vous oublient, vos amies vous raillent et vous méprisent ; le monde enfin avec sa générosité habituelle lapide votre honte en vous jetant la première et la dernière pierre. Acceptez-vous ? — Oui 1 soupire la pauvre femme en pleurs en baissant la tête. — Fort bien. C est une comédie que je vous impose comédie de salon à deux personna ges. 1 âcliez de remplir votre rôle correcte ment, sinon j'interromps la pièce et je baisse la toile. Pour être applaudie, vous n'aurez qu’à vous figurer que je suis votre défunt amant, Fabrice de Tourtoirac,.,...
À propos
Fondé en 1889 à Lille, Le Réveil du Nord s'est d'abord défini comme une parution radicale et antiboulangiste du Pas-de-Calais. Les années suivantes, il s'affirme comme la plus grande publication de gauche de la région avant, contre toute attente, de sombrer dans le collaborationnisme sous l'Occupation. En conséquence de quoi le journal fut interdit en 1944.
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