Extrait du journal
CHERCHEURS D'OR Ce n'est pas un métier do plaisir que celui de chercheur d’or. On part, avec, l’illusion de la fortune rapide; quelquefois on arrive, maison ne revient pas toujours. C'est en 1849, je crois, qu'eut lieu la fameuse exode pour la Californie. Que de misères, de déceptions et de morts! On en trouvait, de l'or; mais la main-d’œuvre était si lourde, les moindres choses indispensables à la vie, d'un prix si élevé, que les plus heureux dépensaient tout et que les autres mouraient de faim sur un territoire dont le sous-sol contenait des millions. Aujourd’hui, chose pire encore, c’est dans les régions les plus septentrionales que les cher cheurs d’or vont exercer leur métier, si c’en est un. Il parait même que pour leur rendre la vie moins triste et moins monotone, des âmes cha ritables et bien pensantes leur ont envoyé des cargaisons de jeunes femmes, en vue, bien en tendu, de légitimes unions. C’est une bonne pensée ; mais pour nourrir tout cela, hommes et femmes, sur un sol qui ne produit rien, ou à peu près, ni flore légumière, ni faune comestible, à moins que des phoques et des pingouins, il faut envoyer de temps en temps un navire chargé de vivres. Le plus récemment expédié dans ce but vient de faire naufrage dans le détroit do Barclay, et toute la cargaison est perdue, sans compter la moitié de l’équipage au moins. On ne pense pas sans frémir à ces pauvres gens des mines du Klondike, dont quelques-uns sont déjà très riches peut-être, et qui n’ont rien à se mettre sous la dent, tout en couchant sur les pépites qu’ils ont récoltées. Partout où l’or sera signalé, des ambitieux et des faméliques se mettront en route, nouveaux Jasons, mais dont on ne chantera jamais que les misères et les tribulations. La police n’en arrêtait-elle pas un hier, très jeune encore, pourvu de diplômes difficiles à obtenir, môme docteur en médecine et relativement fort riche... autrefois? Un beau jour, il entend parler du Transvaal, de la richesse exceptionnelle de scs sous-sols miniers ; il s’embarque, il arrive, dévore bientôt son assez gros magot, et revient mourir pres que de faim sur le pavé de Paris, vagabond ayant rêvé des millions et n’ayant plus de quoi acheter un sou de pain pour se nourrir et une botte de paille pour se reposer, on ne sait où, mais quelque part, avant d'échouer au poste do police. Les pauvres diables du Klondike sont plus malheureux encore, car ils nourraient bien mourir de faim, si un navire libérateur n’arrive pas, dans des délais rapprochés. C’est ce que l'on appelle courir après la Chimère : monstre dévorant ou toison d'or, c’est toujours la même chose. Mais on n’en guérira jamais l’humanité. Jean de Nivelle....
À propos
Fondé en 1873 par Édouard Hervé, Le Soleil était un quotidien conservateur antirépublicain. Avec son prix modique, il cherchait notamment à mettre la main sur un lectorat populaire, audience qu'il n'arrivera toutefois jamais à atteindre du fait de ses orientations politiques. Le succès du journal fut pourtant considérable à une certaine époque, tirant jusqu'à 80 000 exemplaires au cours de l'année 1880.
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