Extrait du journal
des plaisanteries de rapin. Je me rappelle fort bien avoir traversé cet état d’esprit, qui, chez d’autres, a pu être spontané; qui, chez moi, n’était qu’un produit factice de la littérature ambiante. Barrière, lui, y allait bon jeu, bon argent. Il croyait fermement que l’artiste était naturelle ment capable de toutes les générosités et de toutes les tendresses, le bourgeois de toutes les vilenies. Il croyait encore que l’artiste, sur tout quand il était peintre, devait fourrer de l’esprit dans tous ses propos, et d’un certain esprit qui était celui d’atelier, à moins qu’il ne fût sentimental et mélancolique, auquel cas il exhalait naturellement une poésie idyllique et romanesque. Octave Delcroix est l’artiste sentimental, d’un sentimentalisme ingénu et prompt aux emballements ; Edgar est l’artiste blagueur et caustique; et tous deux traversent l’action à laquelle ils sont mêlés d’un bout à l’autre, l’un cueillant les myosotis du sentiment avec des airs attendris de romance, l’autre faisant rage d’esprit contre les travers et les ridicules des sots gonflés d’argent. C’est ce dernier que Barrière a comblé de ses faveurs : c’est lui qu’il a fait le porte-paroles de ses revendications et de ses colères contre la bourgeoisie. Le Vaudeville possédait'alors un acteur que les jeunes gens n’ont pas connu, Félix, mais dont se souviennent tous les hom mes de mon âge. Il excellait à lancer de sa voix cuivrée et mordante tantôt les épigrammes acé rées, tantôt les véhémentes tirades, qu’il en voyait, penché par-dessus la rampe, droit au vi sage des spectateurs. Sa fonction au théâtre était d’être spirituel et agressif; Barrière lui donna tout ce qu’il put d’esprit méchant. Mais l’esprit a ses modes, surtout l’esprit d’atelier. Péponet discute avec Edgar sur la pose et les accessoires du portrait. Edgar, pour se mo quer de ce bourgeois, a proposé de le peindre à l'heure où la lune se lève et le soleil se cou che, afin d’avoir à la fois dans le tableau le so leil et la lune. — Non, répond Péponet, j’aime mieux le so leil de midi. — Avec le canon du Palais-Royal, dit Ed gar à part, avec l’intention de faire- un mot plaisant. — Un beau soleil, reprend Péponet, tapant sur la maison... Vous avez mis la maison? — Parbleu, je crois bien! — Avec toutes ses fenêtres? — Oui, oui, même celles qui sont derrière. — Ca en fera beaucoup"...
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
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