Extrait du journal

Le sort de la convention anglo-turque concernant l'Egypte continue à être en suspens. Sir H.D. Wolff fait d'énergiques efforts pour vaincre les scrupules du sultan; il s'agit pour le diplomate anglais d'obtenir, si possible, la ratification du traité qu'il a pris tant de peine à négocier, pour aujourd'hui ou pour demain, afin de faire hommage de ce succès à la reine pour la journée du jubilé. D'après une dépêche de Varna, que nous citons sous toutes réserves, le plénipotentiaire britannique serait aidé dans ses démarches par les ambassadeurs d'Allemagne, d'Autriche et d'Italie. Ceux-ci représentent au sultan que son refus d'accepter la convention pourrait avoir pour résultat l'occupation perpétuelle de l'Egypte par les Anglais. Il est inutile de faire remarquer que cette éventualité est en tout cas écartée par les engagements contraires précis que le cabinet de Saint-James a pris par plusieurs fois devant l'Europe, et auxquels il aura sans doute scrupule à manquer. Ce sont là des considérations qu'une partie des conseillers du sultan n'auront pas manqué de faire valoir auprès de Sa Hautesse. Leurs arguments auront d'autant plus de poids que le parti des ulémas à Constantinople parait s'être ému de l'atteinte que la convention porte aux droits de suzeraineté de la Turquie sur l'Egypte. Dans une conférence religieuse tenue à Yildiz-Kiosk à l'occasion du Ramadan, un cheik aurait récemment prêché, en présence du sultan et avec des allusions transparentes, sur le texte connu du Coran d'après lequel il est interdit au padischah d'aliéner un territoire musulman aux infidèles. Le commandeur des croyants aurait été vivement touché de cette opposition des docteurs de la loi à l'acceptation de la convention anglo-turque. Sa décision est plus que jamais en suspens; dans un :sens ou dans un autre, elle ne saurait tarder longtemps....