Extrait du journal

Un nouveau prix CE ne sont pas les prix littéraires qui manquent, Dieu merci. Pour tant il faut avouer que celui qui vient d'être créé par une revue bruxelloise comble une lacune. C'est le « prix des grotesques ». 11 sera attribué, sous forme d'un diplôme en peau d'âne, a l'auteur de l'article « le plus odieux, le plus ridicule, le plus déce vant » paru au cours de l'année dans un journal. ( Ce sont les lecteurs de notre confrère belge qui désigneront, par leur vote, l'ar ticle qui leur paraîtra, le mieux mériter le « prix des grotesques ». Il faut bien reconnaître que l'idée de la revue bruxelloise est amusante. Mais — au risque de me voir décerner à moimême le nouveau prix — je me permet trai de penser que le résultat du tournoi des grotesques sera: sans doute assez dé cevant. Comment, en effet, apprécier, doser, juger le ridicule et l'odieux d'un article de journal ? Le même éditorial politique sera considéré comme une manière de petit chef-d'œuvre par les lecteurs qui partagent les opinions du rédacteur, tan dis que les lecteurs appartenant à la co terie adverse estimeront que ce « pa pier » est un monument d'imbécillité. En matière de musique ou de peinture les divergences sont souvent aussi vives qu'en politique. , Sans compter que si, par extraordinaire, on arrivait à se mettre d'accord pour décerner le prix des grotesques, peut-être suffirait-il de quelques années pour dé montrer que l'article a couronné » était, en réalité, prophétique. S'il y avait tu un prix des grotesques il y a cinquante ans on l'eût peut-être donné à un article chantant la louange des peintres impressionnistes, par exem ple 1 Aujourd'hui on est capable de le don ner à une chronique montrant les dan gers de guerre que nous font courir les pacifistes ! Alors ? Alors : c'est dans un demi-siècle, à peu près, qu'on pourra dire quel est, parmi les articles parus cette année, le plus ridicule... — PeospER....