Extrait du journal

A l’heure où paraîtront ces lignes, la crise ministérielle sera terminée, au moins virtuelle ment ; c’est, je crois, lord Kitchener qui, ja dis, annonçait ainsi la fin prochaine de la guerre en Afrique australe ; son euphémisme, depuis lors, a fait le tour du monde. Mais le dénoue ment heureux, que nous souhaitons tous, com ment sera-t-il obtenu ? A quelle combinaison de groupes et à quel dosage d opinions vont aboutir ces entretiens et ces ordres du jour, ces coups de téléphone, ces visites et ces négocia tions ? Quels noms enfin seront inscrits sur la liste officielle et complète, insérée en pre mière page et en gros caractères par tous les journaux > Je n’en sais rien, pareil en cela, sans doute, aux millions de h rançais qui n’ont pas voix au chapitre, et aussi à la plupart de ceux qui au Parlement et dans ses alentours se mê lent, sans attendre qu’on le leur demande, de donner leur avis. Sentant mon ignorance et incapable de for muler aucun pronostic, j’aime mieux réfléchir aujourd’hui à une autre crise, qui a son intérêt aussi : celle du livre, ou plus exactement de la littérature. Je viens d apprendre que la So ciété des Gens de Lettres et le Syndicat des Editeurs se sont mis d’accord pour le contrôle des tirages. Jusqu’ici, la loi sur le dépôt légal des imprimés obligeait les éditeurs et les im primeurs à déclarer, au ministère de l’Intérieur, le nombre d’exemplaires mis en circulation pour chaque édition d’un ouvrage. Mais ces chiffres ne pouvaient être communiqués qu’aux auteurs et aux éditeurs, ou aux personnes qualifiées pour se présenter en leur nom. Auteurs et éditeurs sont également intéressés au succès des livres que les uns se chargent d’é crire, les autres d’imprimer. Un moyen, jus-...